L'adoption

L'adoption

Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Définition. – L'adoption est une technique juridique qui permet de créer une filiation entre deux personnes qui ne sont pas parentes par le sang. Elle « fait fi de la vérité biologique pour consacrer, bien souvent, un lien d'affection »1319. Si elle est de nature élective, un jugement est néanmoins nécessaire pour établir ce lien.
– Une dualité dans les formes d'adoption. – L'adoption a été totalement réformée par la loi no 66-500 du 11 juillet 1966. Elle a introduit, en droit français, deux formes d'adoption1320 :
  • l'adoption plénière, laquelle « confère à l'enfant une filiation qui se substitue à sa filiation d'origine »1321. Elle rompt tout lien entre l'adopté et sa famille d'origine qui disparaît comme si elle n'avait jamais existé1322 ;
  • et l'adoption simple, qui « confère à l'adopté une filiation qui s'ajoute à sa filiation d'origine (…) »1323. Ce dernier continue d'appartenir à sa famille d'origine tout en intégrant celle de l'adoptant. Il a des droits et des devoirs au sein des deux familles.
– L'essor de l'adoption simple. – En 1966, l'adoption est conçue comme permettant « de porter un enfant sans famille sur le seuil d'une famille sans enfant »1324. Elle apparaît comme une mesure de protection de l'enfance pour permettre à un enfant de grandir et de s'épanouir au sein d'une famille. L'adoption plénière est alors plébiscitée tandis que l'adoption simple est considérée comme une forme subsidiaire d'adoption, presque vouée à disparaître. Or, en raison du nombre croissant de familles homoparentales et recomposées, l'adoption simple va finalement être « détournée » de son objet et « instrumentalisée » pour connaître un véritable essor contrairement à l'adoption plénière1325.
– Une institution à multiples facettes. – Aujourd'hui, l'adoption est devenue une institution « multiple et [qui] sert à plusieurs fins : donner des parents à un enfant ; donner un enfant à un couple ; souder les liens d'une famille recomposée ; se lier à l'enfant de l'autre ; instituer un héritier ; obtenir un régime fiscal favorable en cas de transmission de biens ; habiller juridiquement et en dernier recours une parenté d'intention »1326. Néanmoins, pour lui redonner du sens et de la cohérence, une réforme de celle-ci était attendue. Par la loi no 2022-219 du 21 février 2022, le législateur a réformé le régime juridique de l'adoption. Si la mesure emblématique est de l'ouvrir à tous les couples quel que soit leur mode de conjugalité1327, la réforme est finalement « plus que modeste »1328. Celle-ci est d'ailleurs complétée par une ordonnance no 2022-1292 du 5 octobre 2022, entrée en vigueur le 1er janvier 2023, laquelle apporte les dernières retouches à cette institution1329.
– Le rôle du notaire. – Dans le cadre de la procédure d'adoption, l'article 348-3, alinéa 2, du Code civil prévoit que le « consentement à adoption est donné devant un notaire français (…) ». Pour autant, toutes les adoptions ne nécessitent pas l'assistance de ce praticien. En effet, il n'intervient pas dans la procédure d'adoption lorsque l'enfant a été remis au service de l'Aide sociale à l'enfance (ASE)1330. Dans cette hypothèse, le consentement à l'adoption est recueilli par ce service et non par acte authentique1331. Par ailleurs, le notaire n'est pas non plus consulté pour recueillir les consentements dans le cadre d'une adoption internationale telle qu'elle est définie à l'article 370-2 du Code civil1332. S'il intervient dans l'adoption extrafamiliale de personnes majeures1333, le notaire est surtout sollicité dans le cadre d'adoptions intrafamiliales, c'est-à-dire lorsque l'enfant a déjà une famille. Il s'agit alors de créer un lien de filiation :
  • entre l'enfant et un beau-parent : l'adoption est le plus souvent réalisée par ce dernier en la forme simple, lorsque l'enfant est majeur, pour éviter à l'autre parent – celui qui ne partage pas la vie du beau-parent – de perdre l'autorité parentale sur son enfant1334. Elle peut aussi être effectuée en la forme plénière dans les cas limitativement énumérés à l'article 370-1-3 du Code civil1335. Si l'adoption par le beau-parent peut être envisagée pour « pérenniser une recomposition familiale »1336, elle constitue généralement un arrangement de famille à finalité successorale1337. L'adoption est-elle l'outil juridique le mieux adapté ? ;
  • entre l'enfant et le parent d'intention dans le cadre d'une AMP réalisée hors du cadre légal ou d'une GPA pratiquée à l'étranger1338. L'adoption est alors l'ultime étape pour créer un lien de filiation avec l'enfant, permettant « de matérialiser un projet parental commun »1339. Selon les cas, elle sera prononcée en la forme plénière ou en la forme simple.

Adoption intrafamiliale et lien de parenté ou d'alliance

Plus exceptionnellement, le notaire peut intervenir dans une procédure d'adoption intrafamiliale lorsqu'il existe un lien de parenté ou d'alliance jusqu'au sixième degré inclus entre l'adoptant et l'adopté dans l'hypothèse où ce dernier n'aurait pas été remis à l'Aide sociale à l'enfance. Toutefois sont prohibées, depuis la loi du 21 février 2022, les adoptions, tant en la forme plénière qu'en la forme simple, « entre ascendants et descendants en ligne directe », ainsi que celles « entre frères et sœurs » pour « éviter le risque de confusion dans les repères familiaux en raison du bouleversement générationnel que génère l'établissement d'un lien de filiation entre deux personnes déjà unies par un lien de parenté en ligne directe ou collatérale »1340. Néanmoins, l'article 346, alinéa 2, du Code civil prévoit que le « tribunal peut prononcer l'adoption s'il existe des motifs graves que l'intérêt de l'adopté commande de prendre en considérations »1341.
– Plan. – Seront abordés successivement les conditions requises pour l'adoption (Section I) et ses effets tant sur le plan civil que fiscal (Section II). Enfin, seront rappelés les points de vigilance en présence d'éléments d'extranéité lors de la procédure d'adoption (Section III).
Les conditions requises pour l'adoption
– Plan. – Deux phases se succèdent dans la procédure d'adoption. La première consiste en une phase dite administrative où le notaire intervient pour recueillir le ou les consentements indispensables à l'adoption (Sous-section I). La seconde est une phase dite judiciaire relevant de la seule compétence du juge statuant en matière gracieuse (Sous-section II)1342.
Les effets de l'adoption
– Plan. – Que l'adoption soit prononcée en la forme plénière ou simple, le jugement produit ses effets à compter du dépôt de la requête et non au jour de son énoncé1433. L'adoption entraîne alors des conséquences tant sur le plan civil (Sous-section I) que fiscal (Sous-section II) lesquelles ne sont pas identiques selon qu'elle est réalisée en la forme plénière ou simple. Ces effets seront étudiés successivement.
Pour aller plus loin
La présence d'éléments d'extranéité dans la procédure d'adoption
– La loi nationale de l'adoptant. – En présence d'éléments d'extranéité dans le cadre d'une procédure d'adoption réalisée en France comme la nationalité de l'adoptant ou de l'adopté, le lieu de résidence à l'étranger, etc., le notaire se référera à l'article 370-3 du Code civil pour déterminer la loi applicable aux conditions de l'adoption. Selon le premier alinéa de ce texte, « les conditions de l'adoption sont soumises à la loi nationale de l'adoptant ».