L'arrivée d'un enfant
L'arrivée d'un enfant
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Photos de familles aujourd'hui. – Depuis les années 1960, la famille a connu de profondes transformations. Elle ne repose plus aujourd'hui sur un modèle unique, elle est multiple. Qu'il s'agisse d'une famille « monoparentale », « recomposée », « homoparentale » ou « plurielle », elles ont toutes pour dénominateur commun : l'enfant.
– L'arrivée d'un enfant, un nouveau cœur qui bat. – L'arrivée d'un enfant au sein d'une famille crée de grands bouleversements. Si devenir parent est généralement une expérience heureuse, elle implique néanmoins de grandes responsabilités. Les parents ont en effet pour devoir de protéger leur enfant, « dans sa sécurité, sa santé, sa vie privée et sa moralité »663. Ils ont également l'obligation de subvenir à tous ses besoins matériels et affectifs. Ils contribuent à son éducation et doivent le guider pour en faire un adulte responsable et épanoui. Pour cela, l'enfant « doit grandir dans le milieu familial, dans un climat de bonheur, d'amour et de compréhension »664.
– Une filiation légalement établie. – Pour être considéré en droit comme le parent d'un enfant, la filiation doit être légalement établie665. L'existence de ce lien de parenté donne à l'enfant un sentiment d'appartenance à un groupe – une tribu – et de faire partie de son histoire. La filiation lui permet de connaître ses origines, de trouver sa place et son rôle au sein de la famille et de construire sa propre identité. Quant aux parents, elle leur permet de transmettre, outre des valeurs et principes éducatifs, un nom, une nationalité, un patrimoine.
– « Un droit de la filiation en zone de turbulences »666. – Le droit de la filiation repose principalement sur le modèle hétéronormatif. La parenté est fondée sur la vraisemblance biologique, les enfants étant généralement issus d'une relation charnelle entre deux personnes. Cependant, depuis plusieurs années, certains phénomènes bouleversent le droit de la famille. Les avancées médicales permettent à des personnes de devenir parents grâce à l'assistance médicale à la procréation, alors même que la nature les en empêche. Pour établir la filiation en l'absence de réalité biologique, le législateur a mis en place un système juridique qui laisse à penser que l'enfant est issu d'une procréation charnelle. Toutefois, avec la reconnaissance de l'homoparenté667, puis en permettant aux couples de femmes de recourir à l'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur668, il n'est plus possible aujourd'hui de maintenir un droit de la filiation basé exclusivement sur un modèle biologique hétérosexuel. La filiation devient « un lien fondé sur la volonté et l'engagement individuels : volonté, engagement d'assumer l'enfant que l'on choisit d'avoir et de garder ou que l'on décide de faire naître grâce au recours à la science »669.
– Les tiers proches de l'enfant. – Par ailleurs, dans certaines configurations familiales, le ou les parents ne sont pas les seuls à s'investir dans l'entretien et l'éducation de l'enfant. Les beaux-parents sont des tiers qui gravitent autour de l'enfant. Certains d'entre eux, en accord avec leurs beaux-enfants, souhaitent concrétiser un lien juridique dans le but de se voir reconnaître des droits670. Néanmoins, ils n'envisagent pas pour autant d'établir un lien de filiation. Il convient alors de s'interroger sur les outils mis en place par le législateur pour concrétiser la parentalité. Le parent d'intention est également considéré comme un tiers lorsqu'il n'est pas établi ab initio de lien de filiation avec l'enfant. Cependant, à l'inverse du beau-parent, le parent d'intention souhaite généralement établir un lien de filiation à l'égard de l'enfant. Le recours à certains outils juridiques lui permettra d'exercer un rôle de parent en attendant l'établissement ou la reconnaissance du lien de filiation.
– Plan. – Dans cette troisième partie, les différents modes d'établissement de la filiation seront abordés. Il sera également examiné les outils juridiques mis à la disposition des familles pour permettre aux tiers – notamment les beaux-parents – d'exercer une fonction dite « parentale » auprès de l'enfant. Seront étudiées successivement les règles de la filiation fondée sur la vraisemblance biologique (Titre I), sur la procréation avec tiers donneur (Titre II) et sur le vécu (Titre III), en mettant l'accent sur le rôle du notaire. En effet, ce praticien, conseiller des familles pour les transmissions patrimoniales, s'est « vu progressivement confier de nouvelles prérogatives » en matière de filiation, faisant de lui un « interlocuteur privilégié de la cellule familiale et de ses évolutions »671.
La filiation et la vraisemblance biologique
– Des modes contentieux. – Le principe d'égalité posé à l'article 6-2 du Code civil selon lequel tous les enfants ont les mêmes droits et devoirs dans leurs rapports avec leurs parents, suppose que la filiation ait été légalement établie. Si celle-ci est essentiellement établie de manière non contentieuse, elle peut l'être judiciairement.
Pour aller plus loin
La filiation et la procréation avec tiers donneur
– Des techniques interdites. – D'autres techniques ne sont pas autorisées en France, comme celle de la réception d'ovocytes de la partenaire (ROPA). Elle consiste, au sein d'un couple de femmes, pour l'une à fournir ses ovocytes et pour l'autre à porter l'enfant. Cette interdiction repose sur le principe de l'anonymat du don posé à l'article 16-8 du Code civil.
Pour aller plus loin
La filiation vécue
– La fin du modèle unique «
un seul père, une seule mère, pas un de moins, pas un de plus
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Pour aller plus loin