L'émergence d'un couple
L'émergence d'un couple
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Le couple. – Le couple est un des piliers de la famille, si ce n'est le socle. Il est à la base de la majorité des familles et constitue, en lui-même, une famille dans la mesure où certains couples ne peuvent avoir d'enfants ou ne le souhaitent pas. La naissance de la famille commence par la naissance du couple : il s'agit d'une construction – une première union – ou d'une reconstruction dans les cas de recomposition familiale.
– Trois modes de conjugalité. – « Si le couple est affaire de sentiments, il est aussi affaire de patrimoine », de sorte que le droit s'est invité au sein du couple pour fixer des règles applicables pendant toute la durée de leur union233. Si le concubinage a été pendant très longtemps la seule alternative au mariage, ils ne sont plus les deux seules formes de conjugalité depuis la loi no 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité (Pacs)234. Aujourd'hui, pour organiser leur union sur le plan patrimonial, les couples, qu'il s'agisse de personnes de sexe différent ou de même sexe, ont le choix entre une structure conjugale inscrite dans le temps – le mariage – avec des droits et des contraintes qui s'y rattachent, et des unions plus précaires – le Pacs ou le concubinage –, assorties de droits et obligations moindres voire inexistants.
Lorsque des clients consultent un notaire, leur choix est généralement orienté vers l'une des formes d'union. Mais ils peuvent parfois hésiter entre le Pacs et le mariage en raison de leurs incidences sur le plan patrimonial. L'exercice est alors bien connu du praticien, qui va comparer les conséquences tant patrimoniales qu'extrapatrimoniales de chaque forme d'union – concubinage, Pacs et mariage. S'il est indéniable que le mariage présente une plus grande sécurité que le Pacs – et accessoirement que le concubinage –, le Pacs et le concubinage offrent une liberté que ne propose pas le mariage. Si le notaire a un rôle de conseil dans l'échiquier des différents modes de conjugalité, il doit bien se garder de privilégier l'un d'eux par rapport à l'autre. En effet, d'autres considérations entrent en jeu dans le choix du couple pour la forme de leur union, lesquelles leur sont strictement personnelles.
– Les concubins. – Concernant le concubinage, nombre de couples se satisfont d'une telle relation, laquelle n'est plus couverte d'opprobre par la société, l'image des couples « hors mariage » ayant évolué depuis longtemps. Si la formule « les concubins se passent de la loi, la loi se désintéresse d'eux » était exacte lors de la rédaction du Code civil de 1804, le concubinage a fait depuis son entrée dans le Code civil avec la loi du 15 novembre 1999 relative au Pacs. Il est défini comme « l'union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple »235. Néanmoins, en dehors de cette définition, les conséquences du concubinage ne sont reconnues que ponctuellement par la jurisprudence ou certains textes légaux236. Considéré comme une union de fait, le concubinage n'emporte, en général, aucune formalisation lors de sa naissance. La rédaction d'une convention ab initio est rare, voire inexistante dans les études notariales. Si la créativité notariale peut s'exercer pleinement au stade de la naissance du concubinage237, elle n'a, en réalité, pas sa place en pratique car les concubins préfèrent choisir l'inorganisation238. Le notaire sera alors plus à même de les conseiller sur les conséquences de leur situation lors de l'acquisition d'un bien immobilier, la rupture étant malheureusement une étape trop tardive pour faire preuve de créativité à leur égard.
– Les époux et les partenaires. – Si le législateur a « contraint » les futurs époux à consulter un notaire avant la célébration du mariage lorsqu'ils souhaitent aménager le régime légal de la communauté de biens réduite aux acquêts ou pour adopter un autre régime, il en va différemment pour le Pacs. En effet, s'il peut être rédigé en la forme authentique, il peut l'être également sous seing privé. Longtemps mis à l'écart239, le notaire peine à trouver sa place dans la rédaction de telles conventions. La facilité d'enregistrer un Pacs auprès de l'officier d'état civil écarte encore trop souvent les partenaires des études notariales240.
– Un conseil « sur-mesure ». – L'accompagnement du notaire est essentiel pour les futurs époux comme pour les futurs partenaires en raison des conséquences patrimoniales engendrées par la forme de leur union. Le notaire doit en effet apporter un conseil personnalisé, « sur-mesure », et non une information abstraite aux couples. La jurisprudence se montre d'ailleurs exigeante en matière matrimoniale. Le praticien doit conseiller les époux « concrètement au regard de leur situation, en les éclairant et en appelant leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques » de leur engagement241. Il doit « prendre en considération les mobiles des parties, extérieurs à l'acte, lorsqu'[il] en a eu précisément connaissance »242. Si cette jurisprudence a été rendue à propos d'époux, elle peut être étendue aux partenaires. Ainsi en consultant un notaire, le couple, qu'il souhaite se marier ou se pacser, jouira de précieux conseils. Il bénéficiera en outre de la conservation de la convention attachée à l'acte authentique.
– Une ignorance du régime matrimonial ou pacsimonial. – Pourtant, tous les couples ne franchissent pas la porte d'une étude notariale. Il est un constat unanime des praticiens : les époux ou partenaires ignorent pour beaucoup les règles du régime qui les gouvernent. Devant la nécessité de toucher un large public, la volonté d'informer les couples est ancienne. Le Congrès des notaires s'est emparé, à plusieurs reprises, de cette question. Lors du 95e Congrès des notaires à Marseille en 1999, une proposition avait été soutenue en ce sens pour une information « sur les règles juridiques relatives au couple et à la vie parentale »243. Ce fut également l'une des propositions émises lors du 118e Congrès des notaires244. Le législateur a également prévu une information sur le droit de la famille lors des formalités préalables au mariage et en annexe du livret de famille245. Mais le constat d'échec est indéniable. Les époux et partenaires n'ont pas ou peu de connaissances sur leur régime matrimonial ou pacsimonial. Ils ne prennent conscience des conséquences du régime auquel ils sont assujettis, lesquelles peuvent parfois être désastreuses, que lors de sa dissolution.
– Pour une meilleure information. – Les travaux du 121e Congrès, emboîtant le pas de leurs prédécesseurs, convergent vers la nécessité de marteler le message pour en favoriser l'assimilation. Une solution pragmatique consisterait à associer la responsabilité du couple et la mise à disposition d'une information éclairée tant pour les époux que pour les partenaires. Plusieurs axes sont proposés. Tout d'abord, il pourrait être envisagé, à l'instar de la Journée défense et citoyenneté, de cibler l'enseignement académique pour permettre l'apprentissage d'une culture juridique minimale. Pourquoi ne pas introduire un enseignement de droit de la famille auprès des jeunes dans le parcours scolaire ? Ensuite, l'information délivrée dans un livret prénuptial ou « pré-partenarial » pourrait être assortie d'une obligation pour le couple d'indiquer qu'ils ont eu accès à ladite information, qu'ils reconnaissent pouvoir contacter un professionnel du droit et qu'ils ont choisi leur régime matrimonial ou pacsimonial en toute connaissance de cause. Enfin, une infographie pourrait utilement être réalisée afin de toucher tous les publics.
– Plan. – Les développements sur le couple seront consacrés, dans un premier temps, au mariage, pierre angulaire de la famille, qui a tenu pendant des siècles le monopole de l'« union juridique des amants »246 (Titre I), avant de s'intéresser, dans un second temps, au Pacs, phénomène consacré il y a plus d'un quart de siècle par le législateur et dont la popularité ne s'est pas démentie (Titre II).
Le couple marié
– Une liberté encadrée pour l'aménagement du régime matrimonial. – Les époux sont libres d'aménager le régime qu'ils ont pu adopter.
Pour aller plus loin
Le couple pacsé
– Plan. – Eu égard à leur situation personnelle ainsi qu'au cadre juridique qui définit le Pacs, les couples doivent dans un premier temps opter pour le mode de conjugalité qui correspond à leurs aspirations, en l'occurrence le Pacs (Sous-titre I), avant de choisir le régime qui va organiser leurs biens (Sous-titre II).
Pour aller plus loin