La liquidation des droits dans les successions anomales en présence d'un conjoint
La liquidation des droits dans les successions anomales en présence d'un conjoint
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Trois cas de retour. – Trois cas de retour ont été créés ou modifiés par les réformes successorales de 2001 et 2006. D'une part, le droit de retour au bénéfice des frères et sœurs, prévu à l'article 757-3 du Code civil et issu de la loi du 3 décembre 2001, lorsqu'à défaut de descendants et de père et mère du défunt, ils sont en concours avec son conjoint. D'autre part, celui prévu à l'article 738-2 du Code civil et issu de la loi du 23 juin 2006, au profit des père et/ou mère du défunt lorsque celui-ci avait reçu une donation de leur part et qu'il décède sans postérité. Quant au troisième cas, prévu à l'article 368-1 du même code et que la loi du 23 juin 2006 a modifié, il concerne les biens donnés à l'adopté simple décédé sans postérité ni conjoint survivant et revenant au donateur. Ces trois droits de retour présentent un point commun : l'absence de descendants du de cujus.
– Biens dévolus selon leur origine. – Dans ces trois cas, la dévolution de certains biens déroge à la règle de l'unité de la succession dont le postulat, implicite depuis que la loi du 3 décembre 2001 a abrogé l'ancien article 732 du Code civil, est l'indifférence de la nature ou de l'origine des biens quant à leur dévolution. Le retour légal confère un véritable droit de nature successorale, fondé sur le principe dérogatoire de la provenance des biens. On parle à leur sujet de successions « anomales », terme hérité du vieux français, qui signifie que la dévolution s'opère en dehors des règles communes.
– Autonomie de la succession anomale. – Une succession anomale se caractérise par son autonomie à la fois dévolutive et liquidative par rapport à la succession ordinaire. Au décès s'ouvrent alors deux successions distinctes dérogeant ainsi au principe d'unité et d'indivisibilité du patrimoine. Un héritier peut être appelé conjointement aux deux successions, ce qui pourra être le cas notamment du conjoint survivant. Chaque succession, anomale et ordinaire, est alors dévolue selon ses règles propres ; elles sont indépendantes l'une de l'autre. Les deux vocations de l'héritier anomal et de l'héritier ordinaire sont distinctes. Il peut par exemple accepter l'une et renoncer à l'autre. Toutefois, s'il renonce à la succession anomale, sa part tombe dans la succession ordinaire au lieu d'être dévolue exclusivement aux autres héritiers anomaux, ce qui démontre l'autonomie relative de la succession anomale. Comme tout héritier, le successeur anomal est tenu au passif successoral, au prorata de l'actif recueilli ultra vires s'il a accepté purement et simplement. Les biens objets de chaque dévolution forment deux masses séparées.
– Plan. – Seront successivement étudiés le droit de retour au profit des père et mère (Section I) et le droit de retour des frères et sœurs (Section II). Le droit de retour légal en matière d'adoption simple ne sera pas ici développé, car il ne pose pas de difficultés majeures d'application, ne s'exerçant qu'en nature et pour la totalité des biens qui y sont soumis, et ne s'appliquant que si l'adopté simple décède non seulement sans descendance mais également, depuis la loi du 23 juin 2006, sans conjoint survivant. Cette particularité le distingue des droits de retour légaux des père et mère et des frères et sœurs qui vont être étudiés579.
Le droit de retour des père et mère
– Plan. – On verra que ce droit de retour des père et mère soulève de nombreuses difficultés d'interprétation et d'application. Après avoir rappelé sa nature et les conséquences qui en découlent (Sous-section I), nous verrons sa mise en œuvre (Sous-section II).
Pour aller plus loin
Le droit de retour des frères et sœurs
– Conseil pratique. – Lorsque l'article 757-3 du Code civil a vocation à s'appliquer dans la succession ab intestat du de cujus, le notaire devra l'en informer et pourra lui conseiller de l'aménager afin d'éviter des difficultés dans le cadre du règlement de sa succession.
Pour aller plus loin