Un statut successoral pour le bel-enfant ?
Un statut successoral pour le bel-enfant ?
Le droit positif
- la majorité des familles recomposées ne revendique pas de droit à réserve, ni même de droit à héritage pour le bel-enfant ;
- la situation actuelle n'est néanmoins pas satisfaisante, car elle n'accorde pas au beau-parent de conséquences juridiques aux liens d'affection qui ont pu être créés, et oblige à l'établissement d'une filiation inadaptée qui ne respecte pas la famille biologique. Même lorsque les relations entre beau-parent et enfant de la première union sont très fortes, l'adoption simple peut heurter la filiation biologique179 ;
- l'adoption rend l'enfant réservataire à l'égard de son beau-parent, ce que ce dernier ne souhaite pas forcément ;
- la séparation du couple et le décès du conjoint ne devraient pas avoir d'impact sur la permanence de la relation beau-parent/ bel-enfant180 ;
- si l'alignement des droits du bel-enfant sur les descendants biologiques n'est pas attendu, l'ouverture de la possibilité pour le beau-parent de pouvoir gratifier sur la quotité disponible à un barème en ligne directe est une revendication des familles interrogées.
Les voies de prospectives
Stratégies de transmission
Testament et famille recomposée sans enfant commun
Casimir et Michèle ont chacun deux enfants nés d'une union précédente, Éric, Étienne, Simon et Hippolyte. Les quatre enfants ont été élevés ensemble. Les époux ont des biens propres et des biens communs et souhaitent que leur patrimoine soit dévolu par parts égales à leurs descendants, sans distinction selon l'origine des biens.
Le patrimoine commun est évalué à 60 000 €, les biens propres de monsieur à 120 000 € et ceux de madame à 90 000 €. (Le patrimoine total s'élève à 270 000 € que les époux choisissent de répartir en quatre, soit 67 500 €.)
Monsieur, qui a davantage de biens, établit chez son notaire un testament et laisse :
Madame, qui a moins de biens, lègue tout simplement l'usufruit de ses biens à son conjoint.
Les hypothèses de dénouement sont les suivantes :
(E1 : Éric, E2 : Étienne sont les enfants de monsieur, et E3 : Simon, E4 : Hippolyte ceux de madame).
Les enfants reçoivent la même chose en valeur quel que soit l'ordre des décès.
Ce modèle est toujours opérationnel si le patrimoine propre d'un des époux n'est pas trop important. Dans l'hypothèse étudiée, la part reçue par les enfants de monsieur (67 500 €) est supérieure au montant de leur réserve (50 000 €).
- Solution fondée sur le régime matrimonial : le choix d'un régime séparatiste ab initio aurait pu résoudre la question, mais les époux ont volontairement choisi le régime de communauté « pour se protéger » l'un l'autre. Et ils n'envisagent pas de changer aujourd'hui de régime.
- Solution fondée sur l'adoption : l'épouse adopte les deux enfants de la première union de son mari afin de transmettre par succession sa part dans les biens communs par parts égales aux trois enfants, en léguant ses biens propres à l'enfant commun. Si ses biens propres excèdent le quart de son patrimoine, le legs est réductible, puisque ses deux beaux-enfants sont devenus réservataires.
- Solution fondée sur le testament : en supposant mis en place le statut fiscal du bel-enfant, l'épouse pourrait léguer deux tiers de sa part dans les biens communs à ses beaux-enfants. La quotité disponible en présence d'un enfant étant de moitié, il faut s'assurer que les deux tiers transmis n'excèdent pas le disponible.
- Solution fondée sur la RAAR : l'enfant commun intervient pour consentir, aux termes d'une RAAR, à renoncer à agir en réduction du legs. Outre la solennité de la RAAR, son caractère abdicatif stigmatisant n'est pas de nature à assurer une transmission sereine.