Typologie de cas généraux

Typologie de cas généraux

Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Distinctions. – Quatre situations sont distinguées : celle des ayants droit à la fois héritiers légaux et testamentaires, celle des légataires non héritiers, celle du conjoint veuf, enfin celle du partenaire ou concubin.
– Situation des légataires héritiers. – Lorsque le successeur est à la fois héritier et légataire, il est saisi. Il convient de distinguer s'il est bénéficiaire d'un legs particulier, à titre universel, ou d'un legs universel.
Si l'héritier bénéficie d'un legs particulier ou à titre universel, il n'a jamais à demander la délivrance de son legs, dans la mesure où il est saisi. Il n'a pas non plus à se soumettre au contrôle d'envoi en possession. Cette dispense concerne également le conjoint survivant gratifié.
S'il présente la double qualité d'héritier et de légataire universel, un doute subsiste, ainsi que nous l'avons étudié au chapitre précédent, sur la nécessité d'un contrôle notarial de la qualité de légataire en présence d'un testament olographe (ancienne procédure d'envoi en possession). La difficulté provient de la contradiction entre l'article 724 qui investit l'héritier d'une saisine plénière et indivisible et l'article 1007 qui soumet le légataire universel au contrôle. La doctrine et la jurisprudence majoritaire assujettissent le légataire au contrôle de l'article 1007 dès lors que le testament l'investit de droits plus importants que sa vocation légale. Le cumul des qualités de légataire universel et d'héritier ab intestat ne le dispense donc pas d'un envoi en possession en cas d'opposition, non parce qu'il est saisi mais parce qu'il évince d'autres héritiers saisis avec un titre olographe.

L'héritier, légataire particulier

Un défunt laisse un frère et une sœur. Il lègue à sa sœur à titre particulier sa maison. Aucune délivrance de legs n'est à prévoir. Aucune vérification de qualité ni aucun contrôle d'envoi en possession ne sont utiles. Il est de bonne pratique de faire un consentement à exécution des volontés de la personne décédée par le frère.

L'héritier unique, légataire universel

Le défunt laisse un frère unique qu'il institue légataire universel par testament olographe. Celui-ci ne permet pas à l'héritier de recueillir davantage que sa vocation légale. Aucun doute : aucune délivrance de legs n'est à prévoir et la formalité de contrôle de la qualité du légataire est inutile.

L'un des héritiers est légataire universel

Le défunt laisse un frère et une sœur. Il institue sa sœur légataire universelle par testament olographe. Celui-ci permet à la sœur de recueillir davantage que sa vocation légale. La sœur est héritière, elle n'a pas à demander la délivrance. Un doute subsiste sur la nécessité de vérifier sa qualité par le contrôle de l'article 1007 du Code civil. La pratique recommande par prudence de le faire.

– Situation des légataires non-héritiers. – Lorsque le légataire n'est pas héritier, il n'a pas forcément la saisine. Bien que propriétaire des biens légués, il est tenu de satisfaire aux formalités de délivrance ou de contrôle. Il convient de distinguer le legs particulier (ou à titre universel) du legs universel.
Si le legs est un legs particulier, ou à titre universel, quel que soit le testament, il est tenu de demander la délivrance de son legs aux réservataires, à défaut au légataire universel, à défaut aux héritiers ab intestat.
Si le legs est un legs universel, il faut distinguer suivant qu'il existe ou non des héritiers réservataires et suivant la forme du testament olographe ou authentique.
En l'absence d'héritier réservataire, le légataire universel est saisi. Institué par acte authentique, il n'a jamais à demander le contrôle de sa qualité. Institué par testament olographe, il doit l'obtenir ou à défaut, en cas d'opposition, requérir l'envoi en possession du tribunal.
En présence d'héritier réservataire, le légataire universel n'est pas saisi, il doit obtenir la délivrance de son legs, quelle que soit la forme du testament.

Le legs particulier à un non-héritier en l'absence de legs universel

Le défunt laisse un frère et une sœur. Il lègue à un neveu une somme d'argent de 30 000 €. Le neveu demande à sa mère et son oncle la délivrance de son legs.

Le legs particulier à un non-héritier, en présence d'un legs universel

Le défunt laisse sa belle-fille, la fille de son épouse prédécédée, légataire universelle. Il lègue à titre particulier sa collection de tableaux à un musée. Le musée demande à la belle-fille la délivrance de son legs.

Le legs universel à un non-héritier en l'absence de réservataire

Le défunt a institué l'enfant de sa compagne légataire universel par testament olographe. Il ne laisse pas de descendant, mais un frère et une sœur. Le bénéficiaire doit faire contrôler sa qualité de légataire par le notaire et en cas d'opposition demander l'envoi en possession.

Le legs universel à un non-héritier en présence de réservataire

Le défunt a institué son beau-fils légataire universel par testament olographe. Il laisse un enfant. Le beau-fils doit demander la délivrance de son legs à l'enfant.

– Situation du conjoint veuf légataire. – Le conjoint survivant est saisi dans tous les cas (C. civ., art. 724), qu'il soit héritier ab intestat, bénéficiaire d'une donation entre époux, ou d'un testament. Il n'a jamais à demander la délivrance de sa libéralité. Néanmoins, lorsqu'il est gratifié d'une libéralité universelle par testament olographe, la question du contrôle de sa qualité de légataire fait encore débat. Doit-il se soumettre aux formalités de vérifications de l'article 1007 du Code civil ? Il convient de distinguer s'il est en concours avec d'autres héritiers (descendant ou ascendant) ou unique héritier légal.
En présence de descendant ou d'ascendant : le conjoint survivant n'a pas à demander la délivrance de son legs. S'il est bénéficiaire d'une donation entre époux ou d'un testament authentique, ou institué légataire particulier, aucune formalité n'est nécessaire. S'il est institué légataire universel par titre olographe ou mystique, il y aurait un doute pour savoir s'il doit se soumettre au contrôle de sa qualité de légataire. La question, ouverte sous l'empire de la loi ancienne, resterait d'actualité sous le nouveau régime. Certains auteurs préconisent d'appliquer la règle jurisprudentielle classique : dans la mesure où le testament olographe conférerait au conjoint plus de droits que sa vocation d'héritier, l'examen de l'article 1007 est nécessaire. Cette question peut paraître curieuse. Le conjoint est un héritier saisi de plein droit. Sa saisine est indivisible et lui permet d'appréhender l'intégralité de la succession, d'autant plus qu'en présence de réservataire le contrôle est en principe exclu. Ainsi que le souligne le professeur Michel Grimaldi, « il est étonnant que le titre lui retire ce que la loi lui donne » . La majorité de la doctrine considère qu'ayant la saisine, le conjoint n'a plus à faire contrôler sa qualité de légataire, de surcroît lorsqu'il est réservataire.
La solution que nous recommandons est celle de la signature d'une option dans laquelle les héritiers réservataires et les ascendants consentent à l'exécution de la libéralité, afin d'aligner le conjoint testamentaire sur la situation du conjoint institué contractuel par donation entre époux.
En présence d'ascendants uniquement : le conjoint est alors réservataire. Le legs universel lui ouvre des droits supérieurs à ses droits légaux. Certains préconisent d'appliquer par mesure de prudence le contrôle de la qualité du légataire. Nous préférons recourir à un consentement à exécution lorsque le conjoint vient en concours avec les ascendants et, lorsqu'il est seul ayant droit (par défaut d'application du droit de retour légal), de ne pas procéder à la vérification de son titre.
En l'absence de descendants et de père et mère, le conjoint recueille toute la succession (C. civ., art. 757-2) ; il est en outre réservataire dans cette configuration (C. civ., art. 914-1). Étant l'unique héritier, il n'a pas à demander la délivrance de son legs ni le contrôle de sa qualité de légataire, notamment aux frère et sœur.

Le conjoint légataire universel en présence de réservataire

Le défunt laisse un conjoint légataire universel par testament olographe et deux enfants d'unions différentes. Un doute subsisterait sur la nécessité d'examiner sa qualité. Nous recommandons un simple consentement à exécution.

Le conjoint légataire universel en présence d'ascendants

Le défunt laisse un conjoint légataire universel par testament olographe et son père. Un doute subsisterait sur la nécessité d'examiner sa qualité. Peu de notaires réalisent néanmoins cette formalité. Nous ne la conseillons pas.

Le conjoint légataire universel seul héritier

Un défunt marié a institué par testament olographe son épouse. Il ne laisse ni parents ni descendant, mais un frère. La veuve recueille sans formalité d'examen toute la succession.

– Situation du partenaire et du concubin. – Le partenaire comme le concubin gratifié se retrouvent dans la situation des légataires non héritiers. Ils doivent demander aux héritiers du sang ou au légataire universel la délivrance de leur legs particulier ou à titre universel, et aux réservataires la délivrance de leur legs universel. Ils doivent se soumettre au contrôle notarial de leur qualité de légataire universel dans tous les autres cas.

Le conjoint partenaire ; le concubin

Exemple : Le défunt laisse un frère et une sœur et un concubin. Il lègue à son concubin une somme d'argent de 100 000 €. Le concubin demande au frère et à la sœur de la personne décédée la délivrance de son legs.

Exemple : Le défunt a institué sa partenaire légataire universelle par testament olographe. Il ne laisse pas d'enfant, mais un frère et une sœur. La partenaire doit faire vérifier sa qualité de légataire (C. civ., art. 1007).

Exemple : Le défunt a institué sa concubine légataire universelle par testament olographe. Il laisse un enfant, fils de sa compagne. La concubine mère de l'enfant doit demander la délivrance de son legs à son fils.