Quantum et chiffrage de la réserve et de la quotité disponible

Quantum et chiffrage de la réserve et de la quotité disponible

Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– La deuxième opération. – La deuxième opération consiste à déterminer le taux de la réserve et à appliquer ce taux à la masse de calcul préalablement liquidée afin de chiffrer la réserve et corrélativement la quotité disponible. Depuis la loi du 23 juin 2006, qui a supprimé la réserve des ascendants, désormais seuls les descendants (§ I), et à défaut de ceux-ci le conjoint survivant (§ II), ont la qualité d'héritiers réservataires.

Réserve des descendants

– Quotité disponible ordinaire ou spéciale. – Le taux de la quotité disponible en présence de descendants est variable selon qu'il s'agit d'apprécier la réductibilité de libéralités adressées au conjoint survivant ou à d'autres que lui. Dans le premier cas, on parle de quotité disponible ordinaire (A), dans le second cas, de quotité disponible spéciale (B).

Taux de la quotité disponible ordinaire (QDO)

– Taux variable selon le nombre d'enfants. – Le taux de la quotité disponible ordinaire est variable selon le nombre d'enfants laissés par le défunt venant à la succession soit personnellement soit en y étant représentés. L'article 913 du Code civil fixe ces taux à 1/2 si le défunt laisse un enfant, 1/3 si le défunt laisse deux enfants, 1/4 si le défunt laisse trois enfants ou plus. Corrélativement, le taux de la réserve globale est de 1/2, 2/3 ou 3/4 selon que le défunt laisse un, deux ou au moins trois enfants. La réserve globale se calcule donc en fonction du nombre de souches lorsque la succession est dévolue, en tout ou partie, au-delà du premier degré (C. civ., art. 913-1) et se répartit ensuite entre les membres de chaque souche, selon les règles de la dévolution légale.
– Cas de l'enfant renonçant. – Alors qu'avant la loi du 23 juin 2006 la jurisprudence décidait que l'enfant renonçant devait être pris en compte pour le calcul de la quotité disponible, l'article 913, alinéa 2 du Code civil issu de cette loi revient sur cette règle jurisprudentielle, édictant que : « L'enfant qui renonce à la succession n'est compris dans le nombre d'enfants laissés par le défunt que s'il est représenté ou s'il est tenu au rapport d'une libéralité en application des dispositions de l'article 845 ». Donc, pour les successions ouvertes après le 1er janvier 2007, en principe l'enfant renonçant n'est pas pris en compte sauf dans deux cas : lorsqu'il est représenté ou lorsqu'il a bénéficié d'une libéralité qui l'astreint au rapport en cas de renonciation en application de l'article 845 du Code civil.
– Cas de l'enfant unique prédécédé ou renonçant laissant plusieurs descendants. – En application de l'article 913-1 du Code civil, qui précise que : « Sont compris dans l'article 913, sous le nom d'enfants, les descendants en quelque degré que ce soit, encore qu'ils ne doivent être comptés que pour l'enfant dont ils tiennent la place dans la succession du disposant », il y a lieu de considérer que le principe du calcul de la réserve par souche n'est pas modifié même lorsque la succession est dévolue uniquement à des successibles de degrés supérieurs venant de leur propre chef655. Autrement dit, la réserve globale reste inchangée à la moitié de la succession en cas d'enfant unique prédécédé ou renonçant, et ce même si les petits-enfants viennent à la succession de leurs grands-parents de leur propre chef et non par représentation.
– Cas de l'enfant présumé ou déclaré absent. – Si un enfant a cessé de paraître sans que l'on ait de nouvelles, toute personne intéressée ou le ministère public peut demander au juge la mise en place d'une première phase dite « de présomption » durant laquelle l'absent est présumé en vie. L'article 725, alinéa 2 du Code civil dispose que : « Peut succéder celui dont l'absence est présumée selon l'article 112 ». Durant cette phase, la quotité disponible et la réserve doivent être calculées en tenant compte de l'absent. Si ce dernier ne reparaît pas dans le délai de dix ans à compter du jugement de présomption d'absence, le juge peut, à la requête également de toute partie intéressée ou du ministère public, rendre un jugement de déclaration d'absence. En vertu de l'article 128, alinéa 1er du Code civil, le jugement déclaratif d'absence emporte, à partir de sa transcription à l'état civil, tous les effets du décès. À partir de ce moment, l'absent, alors présumé mort, ne doit donc plus être pris en compte pour le calcul de la réserve. Néanmoins, si la survie de l'enfant déclaré absent au jour de l'ouverture de la succession pouvait être prouvée ultérieurement, il conviendrait de procéder à une nouvelle dévolution de la succession. En vertu de l'article 130 du Code civil : « L'absent dont l'existence est judiciairement constatée recouvre ses biens et ceux qu'il aurait dû recueillir pendant son absence dans l'état où ils se trouvent (…) ».

Taux de la quotité disponible spéciale (QDS)

– Branches de l'option. – Le conjoint survivant bénéficie d'une quotité disponible élargie dite « spéciale », fixée par l'article 1094-1 du Code civil. Par conséquent, les libéralités qui lui sont consenties par le de cujus sont moins exposées que les autres à la réduction. Ce texte prévoit une option à trois branches : soit la pleine propriété de la QDO, donc variable comme on l'a vu en fonction du nombre d'enfants, soit 1/4 en pleine propriété et 3/4 en usufruit, soit la totalité en usufruit.
– Titulaire de l'option. – En principe, le titulaire de cette option est le défunt. Toutefois, en pratique et généralement, il la délègue dans la libéralité à son conjoint survivant. Mais c'est bien du de cujus, et non de la loi, que le conjoint survivant tient cette option à trois branches656. Aussi le défunt peut-il l'encadrer ou la limiter comme il l'entend dans les limites posées par l'article 1094-1 du Code civil. Si le conjoint survivant décède avant d'avoir opté, à défaut de clause particulière, l'option est alors transmise à ses héritiers.

Réserve du conjoint survivant

– Taux fixe. – Ce n'est qu'à défaut de descendant que le conjoint bénéficie de la qualité d'héritier réservataire. Sa réserve est fixée invariablement à un quart des biens et donc corrélativement la quotité disponible est fixée aux trois quarts.
– Divorce. – Depuis la loi du 23 juin 2006 entrée en vigueur le 1er janvier 2007, seul le divorce prive le conjoint de sa qualité de successible et d'héritier réservataire. Par conséquent, le de cujus ne pourra pas exhéréder son conjoint réservataire et le priver de sa réserve tant que le divorce ne sera pas prononcé.