Le rétablissement de la présomption de paternité

Le rétablissement de la présomption de paternité

Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Le rétablissement de plein droit par une possession d'état. – Selon l'article 314 du Code civil, la présomption de paternité se trouve rétablie de plein droit en faveur de l'enfant conçu pendant une période de séparation légale ou déclaré à l'état civil sans indication du nom du mari en qualité de père si deux conditions sont réunies :
  • l'enfant a la possession d'état à l'égard de l'époux, laquelle doit être continue, paisible, publique et non équivoque771. La possession d'état à l'égard de la mère est indifférente ;
  • aucune autre filiation paternelle n'est établie à l'égard d'un tiers.
Des auteurs se sont interrogés sur la nécessité d'établir un acte de notoriété pour constater la possession d'état permettant de rétablir la présomption de paternité. Si certains d'entre eux ont considéré que celui-ci serait inapproprié772, la circulaire du 30 juin 2006 et celle du 28 octobre 2011 rappellent que « la possession d'état doit (…) être constatée par un acte de notoriété ou un jugement » et constitue « un mode d'établissement de la filiation utile principalement pour rétablir de plein droit la présomption de paternité du mari ». Ces deux textes ajoutent que « les époux peuvent demander la délivrance d'un acte de notoriété », laquelle constatera la possession d'état à leur égard et rétablira alors la filiation paternelle773. Toutefois, un auteur exprime « un doute (…) sur la réalité de l'intervention de la présomption de paternité dans l'établissement de la filiation paternelle »774. En effet, la possession d'état constitue en elle-même un mode d'établissement de la filiation. Elle repose sur le « vécu familial manifestant un engagement de nature parentale »775. La publicité de l'acte de notoriété est d'ailleurs faite en marge de l'acte de naissance de l'enfant sur instructions du procureur de la République de sorte que la filiation est bien établie à l'égard du père, époux de la mère, par la possession d'état constatée dans un acte de notoriété776. Pour l'auteur, « il n'y a guère de sens à dire que la présomption de paternité est rétablie par la preuve d'une situation, la possession d'état paternelle (…) est en soi suffisante pour établir la filiation »777. On peut dès lors penser que cette règle posée à l'article 314 du Code civil affaiblit d'une certaine manière la présomption de paternité.
– Le rétablissement facultatif par la reconnaissance volontaire. – Quant à l'article 315 du Code civil, il énonce que « lorsque la présomption de paternité est écartée dans les conditions prévues à l'article 313, ses effets peuvent être rétablis en justice dans les conditions prévues à l'article 329 ». Il est peu probable que l'époux agisse sur le terrain judiciaire pour rétablir les effets de la présomption de paternité. En effet, si les éléments de la possession d'état sont réunis, il lui suffit de demander l'établissement d'un acte de notoriété778. Surtout, l'article 315 précité prévoit que le mari a également la possibilité de reconnaître l'enfant conformément à l'article 316 du Code civil779. Cette reconnaissance sera sans doute préférée à l'acte de notoriété constatant la possession d'état pour des raisons de simplicité, de rapidité et de coût780. La filiation paternelle n'est alors pas établie par la présomption de paternité, mais bel et bien par la reconnaissance qui constitue un mode autonome pour établir la filiation. L'adage pater is est quem nuptiae demonstrant s'en trouve encore amoindri. Celle-ci étant fragilisée dans son principe, se pose alors la question de l'opportunité d'une telle présomption au xxi e siècle.