Le décès de la caution
Le décès de la caution
Les conséquences civiles du décès de la caution
Le décès de la caution : l'enjeu lié à la distinction des dettes déterminées et des dettes indéterminées
M. Edimbourg est le dirigeant de la SAS Idol, société qui exploite un hôtel.
Cette société a emprunté en 2023 la somme de 400 000 € auprès du Crédit Agricole pour réaliser différents travaux d'amélioration de l'hôtel.
M. Edimbourg s'était porté caution solidaire de cet emprunt.
Par ailleurs, la SAS Idol bénéficie d'une autorisation de découvert auprès du Crédit Agricole pour le fonctionnement de ses besoins en fonds de roulement (convention de compte courant entre SAS Idol-Hôtel et le Crédit Agricole permettant « d'être à découvert »).
M. Edimbourg s'est également porté caution solidaire de cette autorisation de découvert.
Par ailleurs, M. Edimbourg s'est porté caution solidaire d'un bail d'habitation qui a été conclu au profit de sa mère portant sur un appartement situé à Montpellier.
Le 15 mars 2025, M. Edimbourg décède laissant deux enfants de dix-huit et vingt ans pour lui succéder.
Au moment de son décès, la situation passive de la société Idol était la suivante :
• le prêt-travaux de 400 000 € était remboursé à hauteur de 100 000 € (il restait donc 300 000 € à rembourser) et aucun défaut de paiement n'avait été constaté (autrement dit, M. Edimbourg, en tant que caution, n'avait jamais été engagé de son vivant) ;
• le découvert en compte courant était de 10 000 € (la banque n'avait pas actionné M. Edimbourg au titre de son engagement de caution puisqu'elle « travaillait » en confiance avec lui et acceptait donc ce découvert qui restait dans une limite raisonnable) ;
• la mère de M. Edimbourg était à jour du règlement de ses loyers.
Malheureusement, compte tenu du décès de M. Edimbourg, la société Idol peine à mener à bien ses affaires au point bientôt d'être en grande difficulté pour acquitter son passif :
• suite à trois échéances de prêt non payées après le décès, le crédit-travaux de 300 000 € est devenu immédiatement exigible ;
• le découvert en compte courant s'est creusé à 70 000 € après le décès.
Par ailleurs, la mère de M<sup>me</sup> Edimbourg, déprimée par le décès de son fils, n'a pas payé trois loyers suite au décès, ce qui correspond à un montant de 2 400 €.
La banque ainsi que le bailleur envisagent de faire jouer le cautionnement.
Les héritiers, très inquiets, demandent à leur notaire s'ils pourraient être amenés à payer les dettes en vertu de l'engagement de caution qui a été souscrit par leur père.
<strong>Solution :</strong>
• le cautionnement de la dette du prêt-travaux étant un cautionnement d'une dette déterminée, la dette de cautionnement est considérée comme étant née avant le décès. La dette de cautionnement de 300 000 € de la SAS Idol se transmet donc intégralement aux héritiers de M. Edimbourg. Il importe peu que le défaut de paiement se soit produit après le décès puisque la dette est réputée être née avant le décès ;
• le cautionnement du découvert en compte courant est un cautionnement d'une dette indéterminée de telle sorte que seul le montant du découvert au jour du décès peut être transmis aux héritiers : la dette de cautionnement sera donc transmise aux héritiers de M. Edimbourg à hauteur de 10 000 € (et non à hauteur de 70 000 €) ;
• le cautionnement de la dette de loyer étant un cautionnement de dette déterminée, celle-ci est considérée comme étant née avant le décès. Elle est donc transmise aux héritiers malgré le fait que les impayés se soient manifestés après le décès.
Plusieurs solutions pourront être proposées aux héritiers :
• solliciter l'ouverture d'une procédure de sauvegarde (si Idol n'est pas en cessation des paiements) ou de redressement judiciaire (si Idol est en cessation des paiements mais que sa situation n'est pas irrémédiablement compromise), car dans ce cadre les cautions bénéficient d'une suspension des poursuites tant pendant la période d'observation qui peut durer douze mois (sauvegarde) ou dix-huit mois (redressement judiciaire) que pendant la durée du plan, lequel peut durer dix ans ;
• accepter la succession à concurrence de l'actif net ;
• renoncer à la succession.
Rappel des mentions manuscrites imposées par la loi jusqu'au 1 janvier 2022
Les conséquences fiscales liées au décès de la caution
Le montant déductible d'une dette de cautionnement en cas de signature d'une transaction postérieure au décès
M. Edimbourg est décédé et a laissé à sa succession les dettes de cautionnement suivantes :
• une dette de cautionnement relative à une dette de crédit bancaire d'un montant de 300 000 € ;
• une dette de cautionnement relative à une dette de compte courant d'un montant de 10 000 € ;
• une dette de cautionnement de loyers de 2 400 €.
Six mois plus tard, au jour du dépôt de la déclaration de succession, la situation est la suivante :
• la dette de compte courant de 10 000 € a été effectivement payée par les héritiers ;
• la dette de cautionnement relative au bail n'a pas été demandée par le bailleur ;
• une transaction a été signée avec les héritiers pour que la dette de cautionnement de 300 000 € soit réduite à 60 000 €.
Sur le plan fiscal :
• la dette de compte courant de 10 000 € pourra être déduite compte tenu du fait qu'elle a été effectivement payée : au sens fiscal, la dette est devenue certaine et non plus éventuelle (V., en ce sens, BOI-ENR-DMTG-10-40-20-10, n<sup>o</sup> 80) ;
• la dette liée au bail d'habitation de 2 400 € ne pourra pas être déduite. Au sens fiscal, il s'agit d'une dette éventuelle puisqu'elle n'a pas fait l'objet d'une demande en paiement de la part du créancier (V., en ce sens, BOI-ENR-DMTG-10-40-20-10, n<sup>o</sup> 80) ;
• quant à la dette ayant fait l'objet de la transaction, on peut hésiter entre deux solutions : la prise en compte de la dette pour un montant de 300 000 € puisque le passif successoral doit être apprécié en principe au jour du décès ; à l'inverse, la prise en compte de la dette pour 60 000 € car la transaction a fixé le caractère certain de la dette de cautionnement. C'est cette dernière solution qui est privilégiée par la Cour de cassation : s'agissant de dettes successorales définitivement arrêtées par voie de transaction postérieurement au décès, seule doit être déduite de l'actif imposable la somme contradictoirement et définitivement arrêtée avec le créancier par voie transactionnelle.
L'attention du lecteur est attirée sur le fait qu'il faudrait en principe inscrire à l'actif successoral la créance de recours en application de l'article 758 du Code général des impôts. Mais, aussi surprenant que cela puisse paraître, cette considération qui était fondamentale au début du XX
<sup>e</sup> siècle est totalement occultée par le contentieux moderne…