– Un contrat d'une espèce particulière
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. – Défini à l'article 515-1 du Code civil, le Pacs est un contrat conclu pour organiser la vie commune de deux personnes majeures452. À l'origine, le Pacs ne devait d'ailleurs avoir aucune incidence sur l'état des personnes. Aucune annotation de ce contrat n'était portée sur les actes de naissance des partenaires453. Puis, la loi du 23 juin 2006 a mis fin à cette pratique en créant l'article 515-3-1 du Code civil imposant une mention du Pacs sur l'acte de naissance de chaque partenaire454. Malgré cette réforme, le Conseil constitutionnel a indiqué que le Pacs conservait une nature contractuelle455. Néanmoins, ses dispositions figurant dans le livre premier du Code civil intitulé « Des personnes », les auteurs soulignent que le Pacs se révèle, par son objet, un contrat d'une espèce tout à fait particulière. Il est conçu comme « un statut du couple, à base contractuelle : comme le mariage, il touche à l'état des personnes »456.
Contractualiser la vie à deux
Contractualiser la vie à deux
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– L'existence d'un couple. – Selon l'article 515-4 du Code civil, « les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'engagent à une vie commune ». Lors de l'adoption du Pacs, il a été indiqué qu'il n'est pas un simple arrangement entre amis457. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs précisé que « la notion de vie commune ne recouvre pas seulement une communauté d'intérêts et ne se limite pas à l'exigence d'une simple cohabitation entre deux personnes ; la vie commune mentionnée par la loi déférée suppose, outre une résidence commune, une vie de couple »458. Il ne fait aucun doute, selon cette analyse, que pour conclure un Pacs, les deux personnes doivent former un couple, ce qui suppose, au-delà de la forte communauté d'intérêts et d'affection entre deux personnes, des relations charnelles entre elles.
L'existence d'une relation de type filial entre deux personnes
– Une vie de couple. Le notaire doit-il accepter de recevoir un Pacs entre deux personnes qui déclarent avoir une vie commune mais dont le lien qui les unit correspond à celui qui existe entre un père et son fils ? La Cour de cassation a été amenée à se prononcer dans une telle affaire. Une personne sous curatelle renforcée envisageait de conclure un Pacs avec une personne bien plus jeune ; l'écart d'âge étant de quarante-quatre ans. Le curateur ayant refusé d'assister la personne juridiquement protégée lors de la conclusion de la convention, cette dernière a saisi le juge des tutelles d'une demande tendant à être autorisée à conclure un Pacs. La cour d'appel a refusé d'y faire droit considérant « que la notion de filiation est étrangère à celle de couple et que la définition de leur relation par MM. [X] et [J] ne correspond pas à celle du pacte civil de solidarité,les intéressés ayant déclaré que le lien qui les unissait était celui d'un père à son fils ». La décision est cassée par la Cour de cassation aux termes d'un arrêt du 8 mars 2017 pour violation des articles 515-1 et 515-2, 1o du Code civil. Les juges d'appel ayant constaté « d'une part, l'existence d'une vie commune de vingt-quatre ans entre les intéressés, d'autre part, l'absence de tout empêchement légal à la conclusion d'un pacte civil de solidarité », la convention devait être autorisée459. Si la solution posée par la Cour de cassation est conforme aux textes, on peut néanmoins être surpris par une telle décision. S'il n'existait entre les deux hommes aucun lien de parenté ou d'alliance empêchant la conclusion d'un Pacs, il n'était pas démontré qu'ils formaient un couple. Même si l'article 515-1 du Code civil définit le Pacs comme un contrat conclu par deux personnes physiques majeures pour organiser leur vie commune, il a toujours été présenté comme un contrat de couple. Il suppose par conséquent une communauté de vie et pas seulement une vie commune même si ces deux hommes ont partagé le même toit pendant vingt-quatre ans. Par ailleurs, comme le souligne un auteur, « l'opération avait été montée pour que M. X. puisse bénéficier d'un tarif fiscal plus avantageux (le pourvoi notait que la suggestion avait été faite par le notaire) sans pour autant aller jusqu'au mariage »460. Dès lors, il aurait été préférable pour ces deux hommes d'envisager une procédure d'adoption qui correspondait davantage au lien qui les unissait que de conclure un Pacs461. Cette décision n'ayant pas été publiée, elle constitue certainement un arrêt d'espèce. D'ailleurs, dans un autre arrêt rendu le 29 mai 2024462, la Cour de cassation n'a pas hésité à retenir la fictivité du Pacs conclu entre deux partenaires en raison notamment de l'absence de toute relation sentimentale, monsieur considérant sa partenaire comme sa propre fille.
Ce n'est pas faire œuvre de créativité notariale que de proposer un Pacs à de telles personnes dont l'objectif est manifestement de transmettre un patrimoine exonéré de toute fiscalité au premier décès. Le notaire devrait, dans une telle situation, refuser de le conclure. Mais quelle attitude doit-il alors adopter si ces mêmes personnes souhaitent conclure un contrat de mariage ? Il devrait sans doute prendre la même décision. Néanmoins, l'absence de contrat de mariage préalable à l'union aura pour conséquence de soumettre les époux au régime légal de la communauté de biens réduite aux acquêts. Il est sans doute préférable que ces individus soient mariés sous un régime de séparation de biens. Est-il toutefois nécessaire de rappeler que « le mariage est nul lorsqueles époux ne se sont prêtés à la cérémonie qu'en vue d'atteindre un but étranger à l'union matrimoniale »463 ?