Traitement fiscal

Traitement fiscal

Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Traitement fiscal de l'emprunt. – Il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 747 du Code général des impôts, le droit de partage de 1,10 % est liquidé sur le montant de l'actif net partagé, c'est-à-dire sur l'actif brut cumulé des meubles ou immeubles, détenus par les indivisaires, que ces biens soient situés en France ou à l'étranger, déduction faite du passif grevant la masse indivise.
Il en résulte que le passif grevant la masse partagée doit être déduit pour le calcul du droit de partage. Et pourtant, l'administration fiscale considère parfois que le solde des emprunts restant dû ne s'impute pas sur l'actif partagé, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une dette de l'indivision. Au soutien de son analyse, le Trésor public s'appuie sur un arrêt rendu par la Cour de cassation, le 17 octobre 1995, selon lequel le droit de partage est assis sur la valeur du bien partagé, sans que puissent être déduites les dettes personnelles des copartageants. La Haute juridiction a ainsi jugé que le montant du prix de vente de l'immeuble dont chacun des copartageants restait débiteur au moment du partage, était une dette personnelle de ces derniers et non un passif afférent à l'immeuble partagé.
Ainsi, pour le Trésor public, les emprunts bancaires, contractés par les indivisaires pour financer leur acquisition immobilière, sont des dettes personnelles de ces derniers et non des dettes de l'indivision, de sorte que le solde des emprunts restant dû n'a donc pas à être pris en compte pour déterminer l'actif net partagé.
Cette analyse ne saurait emporter notre conviction, dans la mesure où les prêts contractés en vue de financer l'achat d'un bien indivis ou des travaux sur ce bien ne constituent nullement des créances personnelles entre les indivisaires, mais bien une dette de l'indivision supportée par chacun d'eux proportionnellement à leurs droits. C'est du reste aujourd'hui la position clairement exprimée par la Cour de cassation, laquelle, dans son arrêt du 5 octobre 2016, a rappelé « que l'emprunt immobilier constituait un passif de l'indivision »816.
– Traitement fiscal des comptes d'indivision. – L'on sait que s'agissant des époux mariés sous le régime de la communauté légale, l'administration fiscale considère que le montant des éventuelles récompenses dues par la communauté à l'un des époux – qui figurent dans l'acte de partage au passif de communauté – ne sont pas fiscalement déductibles de l'actif brut pour la détermination des droits d'enregistrement. Pour justifier sa position, qui contredit frontalement les règles civiles, les recettes des impôts avancent l'argument selon lequel les récompenses doivent s'analyser en des prélèvements et non en un passif déductible817. Cette position, aussi critiquable soit-elle, a été intégrée à la pratique du liquidateur taxateur. Mais quid, s'agissant du règlement d'une indivision, de la prise en compte ou non du solde négatif des comptes d'indivision dans l'assiette d'imposition du droit de partage818 ? En l'absence de texte, deux solutions peuvent être préconisées :
  • soit l'on estime, par souci de symétrie, que les comptes d'indivision doivent obéir à un régime analogue à celui énoncé ci-dessus pour les récompenses. À l'instar de ces dernières, cette analyse aboutirait à un système dual, difficilement compréhensible, selon lequel la dette de l'indivision à l'égard de l'un des époux constituerait un « faux » passif, ne venant pas en déduction de l'actif brut alors que la créance de l'indivision à l'encontre de l'un des époux constituerait, au rebours, un « vrai » actif taxable ;
  • soit l'on admet, par souci de cohérence avec la liquidation civile, que ces comptes constituent un actif taxable (en présence d'une créance de l'indivision à l'encontre de l'un des époux) et un passif déductible (en présence d'une dette de l'indivision à l'égard de l'un des époux).
La seconde solution est évidemment avantageuse pour les contribuables et présente en outre l'attrait, pour le notaire, d'être en adéquation avec la liquidation civile établie par ses soins. Elle peut du reste s'appuyer sur la position de la Cour de cassation, laquelle a récemment souligné que « pour déterminer l'actif net de la masse à partager, les dépenses dont il était tenu compte aux indivisaires en application de l'article 815-13 du Code civil, qui constituaient des créances sur l'indivision, devaient être inscrites pour leur totalité au passif de celle-ci et venir en déduction de son actif brut »819.
En l'état, on peut toutefois constater que les agents du Trésor public se trouvent fort désemparés face à cette question et adoptent, au gré des services, l'une ou l'autre de ces solutions, la première ayant semble-t-il toutefois la faveur de la majorité d'entre eux, certainement parce qu'elle présente l'intérêt à leurs yeux d'une justification textuelle indirecte.
En pratique, et en tout état de cause, à défaut de connaître la position de l'administration fiscale concernée, le notaire doit faire œuvre de prudence et provisionner ses frais sur la base de la solution la plus défavorable aux parties, à savoir la première solution, quitte ensuite à devoir restituer le solde si le Trésor public privilégie in fine une solution de bienveillance à l'égard des contribuables.