– Enjeux. – Les quatre formes de testament qui viennent d'être évoquées brièvement offrent au notaire des outils très variés qui répondent chacun de manière appropriée aux attentes des clients. Les propositions qui suivent n'appellent pas d'intervention législative et consistent en de simples préconisations de pratique notariale. L'internationalisation des familles et des patrimoines, la numérisation de nos outils et de notre économie invitent le notariat à renouveler sa pratique.
Propositions d'évolution sur les formes existantes
Propositions d'évolution sur les formes existantes
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Familles internationales. – La première proposition s'impose avec évidence, une famille sur deux en milieu urbain comprenant un élément d'extranéité. Ni le testament olographe ni le testament mystique ne passent aisément les frontières, notamment dans le monde anglo-saxon. Pour éviter, à l'ouverture de la succession, les difficultés d'application et d'exécution d'un testament franco-français, il est plus astucieux de recourir à la forme internationale.
– Contraintes électroniques et numériques. – La réflexion porte sur l'évolution des outils existants. La technique actuelle ne permet pas de recourir à la forme électronique pour le testament authentique avec deux notaires, et c'est fort dommageable. Dans la mesure où l'acte authentique électronique ne permet pas l'insertion de deux clés « Real » pour recevoir un même acte dans un même office, le testament authentique à deux notaires est nécessairement reçu sur support papier. Il est urgent que la technique informatique s'adapte à cette contrainte à l'heure du tout-numérique.
– Cryptoactifs. – Rares sont les notaires, il faut le témoigner, qui ont recueilli des dispositions testamentaires en la forme mystique. Celle-ci paraît surannée et compliquée, pourtant elle revêt une attractivité forte en présence de cryptoactifs, que sont les cryptomonnaies et les non-fungible tokens (NFT). Une réflexion approfondie a été menée à ce sujet lors du 117e Congrès des notaires de France.
Ces actifs anonymes sans titre, ni titulaire, traçables par blockchain, sont enregistrés sur l'ordinateur de l'utilisateur et stockés dans un coffre-fort numérique accessible grâce à une clé de chiffrement secrète. Outre leur aspect spéculatif, le risque important de piratage informatique ou hacking, leur incompatibilité avérée avec les contraintes mises en place par TRACFIN relatives à la lutte contre les circuits financiers clandestins, le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCBC-FT), subsiste un autre danger important, celui d'une perte totale des actifs par disparition de la clé d'accès au décès de l'utilisateur. L'hypothèse du défunt emportant dans la tombe ses clés, rendant impossible pour les héritiers l'accès aux cryptoactifs, n'est pas un cas d'école. S'il est encore marginal aujourd'hui, on peut raisonnablement imaginer que le cas se reproduise régulièrement en présence de décès tragique et soudain.
Le défi est triple : tout d'abord s'imposer, en tant que notaire, comme un acteur infaillible de confiance auprès de nos concitoyens en sphère interne comme internationale pour être le gardien des clés numériques ; en deuxième lieu, se positionner, institutionnellement, comme tiers de confiance lorsque le processus n'est pas entièrement décentralisé ; en troisième et dernier lieu, utiliser le cadre du testament mystique pour recueillir et conserver les identifiants numériques des cryptoactifs. Le coffre-fort physique de l'étude, la confidentialité du testament, son scellement peuvent offrir les garanties nécessaires pour éviter le fiasco d'une disparition, dans l'attente de la création d'un coffre-fort numérique national.