Pour le testateur : (offrir de) cantonner, c'est prévoir

Pour le testateur : (offrir de) cantonner, c'est prévoir

Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Un legs ou une donation entre époux. – Le cantonnement n'est envisageable, en l'état actuel du droit positif, qu'en présence d'une libéralité à cause de mort et non dans la dévolution légale513. L'article 1002 du Code civil ouvre cette faculté aux legs sans restriction : le légataire universel, à titre universel ou particulier peut cantonner. Il en est de même pour le conjoint gratifié par institution contractuelle (C. civ., art. 1094-1, al. 2). Du point de vue du disposant, établir un testament ou une donation entre époux, c'est offrir à ses ayants droit la faculté de choisir avec souplesse la dévolution des biens.
– Ouvrir le cantonnement, un acte de confiance. – Lors de l'établissement d'une donation entre époux ou d'un testament, il est rare de parvenir à se projeter dans l'avenir avec précision. Le patrimoine sera amené à se modifier, les ayants droit à vieillir, les situations de vie à évoluer. Ainsi, lorsque les époux se gratifient quelques années après le mariage, ils laissent au survivant la possibilité de faire le choix le plus adapté au moment du décès. Force est de constater que l'on ne prend pas les mêmes décisions à cinquante ans lorsqu'on est tragiquement veuf et à quatre-vingt-dix ans au terme d'une vie passée l'un avec l'autre. La libéralité ouvre une transmission à la carte. C'est un contrat de confiance.
– Écarter le cantonnement, un acte de prévoyance ? – En famille désunie, le cantonnement n'est pas toujours adapté. Laisser la liberté au gratifié, c'est lui donner une forme de pouvoir ou a contrario le rendre vulnérable aux pressions. Ainsi, il pourrait opérer au décès une sélection peu favorable aux héritiers en « faisant son marché », laissant les biens complexes (procédure, situation locative obérée, peu frugifère, etc.) ou coûteux (charges et travaux importants). Écarter le cantonnement, c'est contraindre le gratifié au choix du tout ou rien.
Il faut reconnaître aussi que certains actifs ne se prêtent pas au cantonnement. Un portefeuille de valeurs mobilières, un immeuble entier, une exploitation agricole, industrielle, commerciale, une forêt, un fonds de commerce, une collection d'objets d'art le subiraient comme une sorte de démantèlement. Le disposant peut légitimement vouloir préserver l'unité d'un ensemble. Le testateur est libre d'écarter la faculté. Les héritiers ne peuvent pas être juges de la légitimité de l'intention, ni s'accorder pour faire un cantonnement transactionnel.