– Un caractère divisible. – La reconnaissance n'établit la filiation qu'à l'égard de son auteur. Ce dernier doit être informé, dans l'acte de reconnaissance, du caractère divisible du lien de filiation établi, c'est-à-dire que les deux filiations, maternelle et paternelle, sont indépendantes l'une de l'autre868.
Les effets de la reconnaissance
Les effets de la reconnaissance
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Un effet rétroactif. – La reconnaissance étant un acte déclaratif et non constitutif de filiation, elle ne fait que constater un lien préexistant. Elle produit par conséquent ses effets rétroactivement au jour de la naissance de l'enfant quelle que soit la date de la reconnaissance, voire au jour de sa conception, si tel devait être son intérêt. Cette rétroactivité n'est pas pour autant absolue. Des exceptions persistent notamment au regard de l'exercice de l'autorité parentale et de l'allocation de subsides869.
– Des effets sur le plan extrapatrimonial et patrimonial. – L'auteur de la reconnaissance doit avoir conscience des conséquences de la création d'un lien de filiation tant sur le plan patrimonial qu'extrapatrimonial870. Ainsi, l'enfant reconnu peut réclamer une succession ouverte entre sa conception et sa reconnaissance, même si celle-ci est entièrement liquidée. L'auteur de la reconnaissance peut se voir imposer une contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, et ce, depuis la naissance871. Il peut devoir en outre des aliments à son enfant reconnu s'il est dans le besoin et inversement872. Les grands-parents sont autorisés à réclamer un droit de visite de l'enfant sauf motifs graves873. L'auteur de la reconnaissance a une vocation héréditaire dans la succession de son enfant, etc.
Le changement de régime matrimonial réalisé avant une reconnaissance volontaire
Quelles sont les conséquences d'une reconnaissance volontaire réalisée par un époux postérieurement à un changement de régime matrimonial ? La Cour de cassation a répondu à cette question, dans un arrêt rendu le 12 décembre 2000, en censurant une cour d'appel qui avait rejeté la demande d'une fille naturelle, née en 1957 et reconnue par son père en 1992, en nullité de l'acte de changement de régime matrimonial réalisé par les deux époux en 1989874. En effet, « la reconnaissance d'un enfant naturel étant un acte déclaratif et non constitutif de filiation, les droits en découlant remontent au jour de la naissance ». Si cette décision a été vivement critiquée à l'époque875, elle est conforme pour autant au droit de la filiation. La loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités a profondément modifié la procédure de changement de régime matrimonial876. Désormais, les enfants majeurs de chaque époux sont informés personnellement de la modification envisagée et ils ont chacun la possibilité de s'y opposer dans le délai de trois mois877. Or, lorsque la reconnaissance volontaire intervient postérieurement à un changement de régime matrimonial, le lien de filiation à l'égard de l'enfant n'est pas encore établi au jour dudit changement. Il n'est alors pas possible de l'informer personnellement de la modification réalisée. Pour le CRIDON de Paris, il semble « raisonnable de se placer au moment de la signature de l'acte notarié de changement de régime matrimonial pour apprécier les formalités nécessaires à sa validité »878. En conséquence, même si les époux ont connaissance, lors du changement de régime matrimonial, d'une action judiciaire en établissement de la paternité – ou de la maternité le cas échéant –, ils n'auraient pas à notifier le changement de régime matrimonial à l'enfant dont la filiation n'est pas encore établie au jour de celui-ci. Néanmoins, en raison de l'effet rétroactif de la reconnaissance volontaire remontant au jour de la naissance de l'enfant, quel sort réserver à l'acte de changement de régime matrimonial ? L'enfant ne pourrait pas non plus contester le changement de régime matrimonial opéré par les époux excepté s'il démontre que celui-ci a été réalisé en fraude de ses droits879. En effet, tout changement de régime matrimonial n'est pas frauduleux en soi. En pratique, c'est d'ailleurs le partage des biens réalisé entre les époux qui est le plus souvent constitutif d'une fraude aux droits des enfants, voire des créanciers. Cette solution a le mérite de préserver la liberté des époux de changer de régime matrimonial et de concilier les intérêts tant du couple que de l'enfant reconnu postérieurement audit changement880. Le droit des régimes matrimoniaux se trouve ainsi préservé face au droit de la filiation.