Les devoirs à respecter

Les devoirs à respecter

Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– La consécration d'un régime primaire. – Si le Pacs crée certains droits entre les partenaires, il a aussi pour corollaire de leur imposer des devoirs réciproques. Selon l'article 515-4 du Code civil, les futurs partenaires « s'engagent à une vie commune, ainsi qu'à une aide matérielle et une assistance réciproques ». En outre, ils « sont tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante », sous réserve d'exceptions expressément prévues par la loi. La circulaire du 5 février 2007 relative à la présentation de la réforme du Pacs a qualifié l'article 515-4 de « régime primaire » en ajoutant que « les règles résultant du nouveau régime primaire sont applicables de plein droit, [à compter du 1er janvier 2007], à tous les partenaires, quelle que soit la date de l'enregistrement de leur convention »541.
– Un régime primaire embryonnaire. – Les devoirs imposés aux partenaires font penser indubitablement à ceux des époux. En ce sens, ils constituent un « écho du quasi-régime primaire »542. Néanmoins, ils n'ont pas tous été repris par le législateur et le régime primaire « reste embryonnaire »543. Il ne s'agit évidemment pas d'un oubli législatif. Le Pacs n'est pas un mariage. En outre, s'il a été conçu initialement comme un « contrat de couple » devenu un « statut de couple », il n'a en principe, sur le papier, aucune dimension familiale. En conséquence, aucune règle relative à la protection du logement de la famille n'est envisagée – tout du moins pendant la durée du Pacs544 –, ni même en cas de crise conjugale entre les partenaires. Il n'est pas non plus prévu une extension de l'article 213 du Code civil aux partenaires. Ces derniers n'assurent donc pas « la direction morale et matérielle de la famille », le Pacs n'ayant pas vocation à fonder la famille. Les devoirs imposés entre les partenaires par le législateur ont trait à leur interdépendance financière tant dans leurs rapports entre eux qu'à l'égard des tiers.
– Une possible créativité notariale ? – Lors de la conclusion du Pacs, les futurs partenaires devraient s'interroger sur l'étendue de leurs devoirs réciproques. Si l'imprimé Cerfa relatif au Pacs ne permet aucun aménagement conventionnel, on peut imaginer l'attente de certains clients qui, en consultant un professionnel du droit, souhaiteront conclure une convention « sur-mesure ». Dans le cadre du régime primaire, le notaire peut-il faire œuvre de créativité ? Est-il possible d'aménager certains des devoirs entre les partenaires (Sous-section I), voire d'imposer certaines obligations réservées uniquement aux époux (Sous-section II) ?

L'énumération exhaustive des devoirs légaux

– Plan. – Outre la vie commune (§ I), les partenaires s'engagent à une aide matérielle et une assistance réciproques (§ II). Ils sont également tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante (§ III). Ces devoirs seront abordés successivement.

L'obligation de vie commune

– Le Pacs sous signature privée. – Les personnes peuvent conclure un Pacs sous signature privée. Les futurs partenaires font alors une déclaration conjointe devant l'officier d'état civil de la commune dans laquelle ils fixent leur résidence commune. S'ils n'ont aucune obligation de résider ensemble au moment de celle-ci, ils sont en revanche tenus de faire une « déclaration de leur adresse commune par une attestation sur l'honneur » laquelle est remise à l'officier d'état civil545. La circulaire du 10 mai 2017 a précisé que « la “résidence commune” doit s'entendre comme étant la résidence principale des intéressés quel que soit leur mode d'habitation (propriété, location, hébergement par un tiers). La résidence désignée par les partenaires ne peut donc correspondre à une résidence secondaire »546. Si la condition de résidence n'est pas remplie, l'officier d'état civil doit alors rendre « une décision d'irrecevabilité motivée par son incompétence territoriale »547.
– Le Pacs authentique. – Cette obligation imposée aux futurs partenaires de déclarer leur résidence commune n'est visée qu'à l'alinéa 1er de l'article 515-3 du Code civil pour déterminer la compétence territoriale de l'officier d'état civil lorsqu'il procède à l'enregistrement du Pacs. Elle n'est pas reprise à l'alinéa 5 de ce même article lorsqu'il s'agit d'un Pacs authentique ; les futurs partenaires sont en effet libres de choisir le notaire chargé de rédiger leur convention, lequel a une compétence sur tout le territoire national. Dès lors, les partenaires sont-ils dispensés, lorsque le Pacs est reçu en la forme authentique, de fixer une résidence commune dans ladite convention ? Si cette notion de résidence commune fixée à l'article 515-3 du Code civil semble être une règle de compétence territoriale pour l'officier d'état civil, l'article 515-1 du même code définit le Pacs comme un contrat conclu « pour organiser [la] vie commune » des partenaires. Cet engagement de vie commune a d'ailleurs été réaffirmé par le législateur en introduisant ce devoir entre les partenaires à l'article 515-4 du Code civil. En outre, lors de la création du Pacs, le Conseil constitutionnel a précisé que « la notion de vie commune (…) suppose, outre une résidence commune, une vie de couple »548. Dès lors, les futurs partenaires ont l'obligation de fixer dans leur convention, que celle-ci soit reçue en la forme authentique ou sous signature privée, une résidence commune.
– Un empêchement grave. – Par une disposition relative à l'incarcération en établissement pénitentiaire549, le législateur a prévu qu'en cas d'empêchement grave à la fixation de la résidence commune, l'enregistrement de la convention de Pacs sera réalisé devant l'officier de l'état civil de la commune où se trouve la résidence de l'une des parties. Si le législateur a envisagé expressément la situation de l'incarcération dans les cas d'empêchement grave, il va de soi qu'une telle disposition peut également s'appliquer aux personnes qui seraient hospitalisées pendant une longue durée, etc. 550.
– Un Pacs sans cohabitation ? – Tout en fixant leur résidence commune dans la convention, les futurs partenaires peuvent-ils avoir des domiciles distincts ? Si l'on se réfère aux époux, l'article 215, alinéa 1er, du Code civil leur impose « une communauté de vie ». Pour autant, l'article 108 du même code prévoit que « le mari et la femme peuvent avoir un domicile distinct sans qu'il soit pour autant porté atteinte aux règles relatives à la communauté de la vie ». Partant du constat de l'impossibilité pour certains couples de cohabiter au quotidien en raison notamment de l'exercice d'activités professionnelles dans des lieux différents, le législateur a adapté le droit à une réalité sociétale. Aucune disposition semblable n'existe toutefois pour les partenaires. Dès lors, l'obligation de la communauté de vie semblerait plus stricte pour les partenaires que pour les époux, et ce, en vue de faciliter « la chasse aux Pacs blancs »551. Néanmoins, si l'exigence d'une résidence commune pouvait se concevoir en 1999 pour éviter que le Pacs, alors nouveau contrat, soit détourné de son objet, elle paraît dépassée en 2025. Comme les époux, les partenaires peuvent être amenés à vivre séparément pour des raisons professionnelles, voire de santé, sans pour autant enfreindre l'obligation de vie commune imposée à l'article 515-4 du Code civil. Leur refuser la possibilité de conclure une convention de Pacs en l'absence de communauté de toit quotidienne constitue une atteinte au libre choix du mode de conjugalité, d'autant que le législateur fiscal le leur permet552. S'il est évident que « la vie commune suppose, en principe, (…) un minimum de cohabitation »553, il existe des situations particulières où un domicile séparé s'imposera sans pour autant qu'il n'y ait aucune communauté de vie entre les partenaires. Enfin, le législateur envisage, depuis quelques années, la possibilité d'un Pacs sans cohabitation en cas de crise grave au sein du couple554. En effet, en cas de violences conjugales, l'article 515-11, 4o du Code civil permet au juge aux affaires familiales de se prononcer sur le logement commun des partenaires en attribuant la jouissance de celui-ci au partenaire qui n'est pas l'auteur des violences. De même, le législateur pénal a prévu une aggravation des peines encourues pour un crime, un délit ou une contravention « lorsque l'infraction est commise par (…) le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, y compris lorsqu'ils ne cohabitent pas »555.

Les preuves liées à une communauté de vie et d'intérêts

Lors de l'établissement d'un Pacs authentique, les futurs partenaires devront fixer une résidence commune. Néanmoins ils pourraient, à notre sens, avoir des domiciles distincts pour des raisons liées notamment à l'exercice de leur activité professionnelle. Le notaire attirera alors leur intention sur le fait qu'ils devront rapporter la preuve d'une communauté de vie et d'intérêts dans l'hypothèse où ils seraient amenés à avoir des domiciles distincts pour éviter toute fictivité du Pacs556.

L'obligation d'une aide réciproque

– Deux piliers fondamentaux. – L'aide matérielle et l'assistance réciproques sont deux piliers fondamentaux du Pacs. Ces notions, bien qu'inspirées des devoirs conjugaux du mariage, se distinguent par une application plus souple et moins contraignante.

Une assistance réciproque

– Un devoir de secours. – L'assistance s'inspire du devoir de secours entre époux prévu à l'article 212 du Code civil. Il s'agit du devoir essentiellement moral – et non financier – pour chaque partenaire de soutenir l'autre, notamment en cas de maladie ou de difficultés personnelles. Ce devoir d'assistance ne devrait pas être différent entre les partenaires et les époux. Cependant, le Pacs étant une convention qui peut être rompue librement et à tout moment, l'un des partenaires peut facilement mettre fin à ce devoir557. Comme pour les époux, ce devoir de secours ne peut être ni supprimé, ni même aménagé.

Une aide matérielle réciproque

– Un partage des dépenses du quotidien. – L'aide matérielle a pour but de garantir que chacun des partenaires contribue à la satisfaction des besoins essentiels du ménage. Elle doit être « proportionnelle » à leurs facultés respectives, sauf s'ils « en disposent autrement » dans la convention de Pacs558. Elle établit ainsi un lien direct entre les ressources de chaque individu et sa contribution aux charges du couple. Est-il alors possible pour les futurs partenaires de supprimer toute entraide entre eux ? Le Conseil constitutionnel a précisé que s'ils sont libres de déterminer les modalités de cette aide, « serait nulle toute clause méconnaissant le caractère obligatoire de ladite aide »559.
– Une application aux dépenses courantes. – L'aide matérielle recouvre les dépenses de nourriture, du logement du couple560, de santé, d'habillement, de transport… Quant aux frais de loisirs, de vacances et d'agrément, ils peuvent être inclus dans la liste des dépenses qui est souvent mentionnée dans la convention de Pacs pour une meilleure compréhension des partenaires sur la notion générique des « charges du ménage », sans que celle-ci soit pour autant limitative.
– Une extension aux dépenses d'investissement. – Les hauts magistrats ont décidé d'inclure, dans le domaine de l'aide matérielle, les dépenses liées à l'acquisition, en indivision, d'un « bien immobilier destiné à la résidence principale » des partenaires561. La Cour de cassation a en effet considéré, par un arrêt du 27 janvier 2021, que le remboursement d'un prêt pour l'acquisition d'un bien immobilier destiné à la résidence principale des partenaires participe de l'exécution de l'aide matérielle entre eux. En conséquence, celui qui a contribué à de telles dépenses au-delà de son financement indiqué dans son titre acquisitif ne peut pas prétendre à une créance contre l'autre, sauf à prouver une éventuelle surcontribution. La jurisprudence relative à la contribution aux charges du mariage entre époux séparés de biens s'étend aux partenaires soumis au régime de la séparation des patrimoines562. Les questions relatives aux époux vont donc se poser, dans des termes identiques, pour les partenaires563. Est-il possible d'exclure conventionnellement les dépenses d'acquisition – ainsi que les dépenses liées à l'amélioration ou à la conservation de la résidence principale – du champ d'application de l'aide matérielle ? Certains auteurs l'admettent, de sorte qu'elle pourrait se réduire aux seules dépenses de la vie courante564. Néanmoins, ce n'est pas la position arrêtée par nos prédécesseurs en l'absence de jurisprudence en la matière. Ils considèrent que la rédaction de l'article 515-4 du Code civil « ne réserve la liberté rédactionnelle qu'en ce qui concerne l'aménagement du règlement de la contribution à l'aide matérielle, non de son périmètre » de sorte qu'« une intervention du législateur est donc ici aussi préconisée »565.
– Une contribution au jour le jour ? – À défaut de pouvoir exclure conventionnellement les dépenses d'investissement du champ d'application de l'aide matérielle, est-il alors conseillé de prévoir une clause selon laquelle chacun des partenaires sera réputé avoir fourni, au jour le jour, sa part contributive en sorte qu'aucun compte ne sera à faire entre eux à ce sujet ? Il sera recommandé de se prononcer expressément, dans la convention de Pacs, sur la force de cette présomption afin d'éviter de s'en remettre à l'appréciation souveraine des juges du fond566. Toutefois, une telle clause viendrait assurément empêcher l'application de l'article 515-7, dernier alinéa, du Code civil qui donne la possibilité, pour chaque partenaire, de compenser ses créances avec les avantages qu'il a « pu retirer de la vie commune, notamment en ne contribuant pas à hauteur de ses facultés aux dettes contractées pour les besoins de la vie courante »567.
– Une extension aux dépenses relatives aux enfants communs. – Si les dépenses liées à l'entretien et l'éducation des enfants entrent évidemment dans les charges du mariage, est-il possible de prévoir, dans la convention de Pacs, une telle extension au titre de l'aide matérielle ? L'aide matérielle est dépourvue de toute vocation familiale. Le Pacs organise uniquement la vie commune de deux personnes majeures tandis que le mariage est considéré, depuis des siècles, comme le socle de la famille, celui-ci ayant une finalité procréative. Néanmoins, il n'est plus aujourd'hui une étape obligatoire pour concevoir un enfant et les statistiques démontrent qu'en 2022, 65,2 % des enfants nés vivants sont nés hors mariage568. Il n'y aurait alors rien de choquant à intégrer, dans le champ d'application de l'aide matérielle, toutes les dépenses relatives aux enfants communs des partenaires569, de sorte qu'ils seraient tous les deux tenus d'y contribuer proportionnellement à leurs facultés respectives. Au demeurant, il serait difficile pour un partenaire de refuser de contribuer à de telles dépenses. En effet, chaque parent doit contribuer « à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent ainsi que des besoins de l'enfant », et ce, quel que soit son mode de conjugalité570. Toutefois, une telle inclusion dans l'aide matérielle peut poser d'autres difficultés dans l'hypothèse où l'un des parents contribuerait plus que l'autre à de telles dépenses alors qu'il est prévu, dans la convention, que les partenaires ne seront assujettis à aucun compte à faire entre eux.
– Sanction en cas d'inexécution de l'aide matérielle. – Dans l'hypothèse où l'un des partenaires n'exécuterait pas son obligation d'aide matérielle, aucune sanction n'est envisagée par l'article 515-4 du Code civil pour l'y contraindre contrairement à l'article 214 relatif à la contribution aux charges du mariage571. Il est alors nécessaire de se référer au droit commun des obligations pour sanctionner une telle inexécution. Par ailleurs, si les partenaires consacrent leurs revenus aux dépenses occasionnées par leur communauté de vie, il est parfois indiqué, dans la convention de Pacs, qu'ils « ne pourront faire d'économies pour leur propre compte qu'autant que les dépenses d'usage liées à la vie commune auront été préalablement acquittées ». Cette obligation n'est pas sans rappeler les dispositions de l'article 223 du Code civil aux termes duquel chaque époux peut disposer librement de ses gains et salaires « après s'être acquitté des charges du mariage ». Si une telle clause paraît pouvoir être introduite dans le contrat de Pacs, son inexécution ne pourra être sanctionnée qu'en se référant au droit commun des obligations, sous la condition de démontrer une absence totale de contribution à l'aide matérielle572.

L'obligation de solidarité passive

– Une extension aux dépenses liées à l'éducation des enfants ? – L'alinéa 2 de l'article 515-4 du Code civil relatif aux dettes contractées par l'un des partenaires pour « les besoins de la vie courante » est quasiment un décalque de la solidarité entre époux prévue à l'article 220 du Code civil pour les dettes liées « à l'entretien du ménage ou à l'éducation des enfants »573. Pour les dépenses relatives à l'éducation des enfants, elles n'ont pas été reprises pour le Pacs, lors des différentes réformes législatives, dans la mesure où le Pacs n'a pas de dimension familiale. Néanmoins, il est évident, pour des auteurs, que la notion de dettes de la vie courante doit recouvrir les dépenses liées à l'entretien des enfants574, de sorte qu'il conviendrait dans cette hypothèse d'inclure de telles dépenses dans le champ d'application de l'aide matérielle. Ne serait-il pas venu le temps de prévoir expressément, à l'article 515-4 du Code civil, que la solidarité s'appliquera entre les partenaires à l'égard des tiers pour les dettes liées à l'éducation des enfants ? Ce serait alors reconnaître explicitement que le Pacs peut aussi fonder la famille avec toutes les conséquences y afférentes comme la protection du logement de la famille…

L'extension impossible des devoirs légaux

– Plan. – Dans la convention de Pacs, le praticien peut-il, à la demande des deux partenaires, prévoir conventionnellement des clauses relatives à la protection de la résidence principale (§ I), au devoir de fidélité (§ II), voire contractualiser les effets pécuniaires lors de la rupture (§ III) ? Ces points seront abordés successivement.

L'absence de protection de la résidence principale

– Pendant la durée du Pacs. – Le législateur n'a prévu aucune disposition protectrice relative au logement de la famille, à l'instar de l'article 215, alinéa 3, du Code civil. Et pour cause, le logement de la famille n'existe pas, le Pacs n'ayant aucune vocation familiale. Néanmoins, si le bien immobilier servant à l'habitation des deux partenaires fait l'objet d'un bail souscrit uniquement par l'un d'eux, l'autre bénéficie de la cotitularité du bail s'ils en font la demande conjointe auprès du bailleur575. Lorsque la résidence principale appartient exclusivement à l'un des partenaires, celui-ci peut en disposer librement, tant à titre onéreux qu'à titre gratuit, sans que l'autre n'ait à y consentir, de sorte que ce dernier « risque de se voir imposer un changement de son lieu de vie »576. Les partenaires pourraient-ils, dans la convention de Pacs, soumettre à une règle de cogestion les actes par lesquels ils disposent des droits qui assurent le logement de la famille ? En effet, « pourquoi les enfants d'un couple marié seraient-ils mieux assurés de la sauvegarde de leur logement que ceux d'un couple pacsé ? »577. Une telle protection ne peut pas être envisagée conventionnellement, et ce, pour plusieurs raisons578. Tout d'abord, un texte spécifique a été créé pour les époux, à l'inverse des partenaires. Ensuite, cette règle de cogestion imposée à l'alinéa 3 de l'article 215 du Code civil constitue une atteinte à la liberté de disposer de son bien immobilier. Sans texte spécifique, il semble difficile d'admettre une telle restriction au droit de disposer. Par ailleurs, cette clause serait inopposable aux tiers, sauf à faire publier la convention de Pacs au service de la publicité foncière. En outre, le partenaire qui n'aurait pas donné son consentement à l'acte de disposition ne pourrait pas en demander la nullité ; l'inexécution de son obligation par le propriétaire du bien immobilier ne pouvant donner lieu qu'au versement de dommages et intérêts. La sanction est finalement peu dissuasive. Enfin, quant au partenaire propriétaire dudit bien, il « serait dépourvu de recours légal pour remédier à d'éventuels blocages résultant d'un refus injustifié ou de l'impossibilité de consentir de son partenaire »579. En effet, les mesures prévues aux articles 217 et 219 du Code civil pour les époux n'ont pas été étendues aux partenaires580. Des auteurs préconisent, dans le cadre de la création d'un statut fondamental applicable à toutes les formes de conjugalité, « une extension de la protection du logement de la famille dans l'intérêt des seuls enfants des partenaires »581.
– À la dissolution du Pacs. – En cas de séparation du couple, le partenaire, non propriétaire du bien immobilier, peut être contraint, par l'autre de quitter les lieux sans préavis. Il ne lui est pas possible de s'y maintenir sans l'accord de son ex-partenaire. En cas de décès, si le partenaire survivant bénéficie d'un droit temporaire au logement – excepté s'il en a été privé par testament du défunt –, il n'a pas de droit viager au logement.

L'absence d'obligation de fidélité

– Une obligation de loyauté – a minima . – Contrairement au mariage, les partenaires ne sont pas tenus par une obligation de fidélité. Pour autant, on imagine mal des futurs partenaires glisser à l'oreille du notaire qu'ils privilégient ce mode de conjugalité en raison précisément de cette absence de devoir. Ce professionnel du droit pourra toujours leur rappeler la célèbre ordonnance rendue par le tribunal de grande instance de Lille le 5 juin 2002, de laquelle il ressort « qu'il existe entre partenaires « pacsés » sinon une obligation de fidélité au moins une obligation de loyauté dérivant du droit commun des obligations contractuelles » et que « l'obligation de devoir exécuter loyalement le devoir de communauté de vie commande de sanctionner toute forme d'infidélité entre partenaires »582. Ainsi, toute partie à un contrat est tenue d'exécuter ses obligations de « bonne foi »583. Même si le partenaire victime d'un adultère a toujours la possibilité de réclamer des dommages et intérêts en cas de circonstances injurieuses lors de la séparation, il n'est pas possible de prévoir, dans la convention de Pacs, ni une clause de fidélité, ni celle prévoyant automatiquement le versement d'une indemnité en cas d'infidélité, car « elles conduiraient à instaurer une cause de dissolution « pour faute » »584. En outre, les tribunaux rappellent régulièrement que le devoir de fidélité est propre au mariage585. Néanmoins, « il n'est pas interdit aux partenaires d'être fidèles. Mais il ne peut s'agir que d'un engagement moral que les intéressés sont libres de prendre ou de ne pas prendre l'un envers l'autre »586.
– Une absence de présomption de paternité. – En réalité, l'absence du devoir de fidélité entre partenaires s'explique par le refus de leur étendre la présomption de paternité587. Le Pacs a été conçu, à l'origine, comme un contrat permettant notamment aux personnes de même sexe de contractualiser leur vie à deux. Le législateur a souhaité éviter toute interaction avec le droit de la filiation pour les empêcher d'accéder à la parenté. Le Pacs ne fonde pas la famille. Toutefois, depuis sa création, l'homoparenté a été reconnue avec l'ouverture du mariage aux personnes de même sexe588. Ces dernières peuvent adopter un enfant, dont celui de leur partenaire589. Les couples de femmes bénéficient aussi de l'AMP avec tiers donneur590. Or, concernant la présomption de paternité, « puisqu'il est de la nature des choses que les enfants nés de parents mariés aient été conçus par ces derniers, il paraît difficile d'admettrequ'il n'en va pas de même pour les partenaires liés par un pacte civil de solidarité (…) »591. Si certains auteurs souhaitent l'étendre aux partenaires au nom d'une stricte égalité entre tous les couples, d'autres revendiquent, au contraire, sa suppression592.

L'impossible contractualisation de la rupture du Pacs

– Des clauses réputées non écrites. – En cas de rupture du Pacs par une séparation des partenaires, certains auteurs se sont interrogés sur la possibilité d'insérer, dans la convention, une clause tendant à exclure tout recours indemnitaire, ou à l'inverse, d'envisager une indemnité due par celui à l'initiative de la rupture ou dont les ressources sont plus importantes. Tout d'abord, toute clause insérée dans le Pacs excluant tout recours indemnitaire serait réputée non écrite en raison de la rédaction de l'article 515-7, alinéa 10, du Code civil visant « la réparation du dommage éventuellement subi »593. Ensuite, pour la clause prévoyant le versement d'une indemnité, certains auteurs sont favorables à l'idée d'anticiper sur la rupture des partenaires594, celle-ci étant désormais une préoccupation de tous les couples ab initio 595. Ils considèrent en effet qu'il ne serait pas déraisonnable d'indemniser le partenaire le plus fragile dont les ressources seraient par exemple fortement diminuées par la rupture du couple après un certain nombre d'années de vie commune. Le Pacs étant un contrat, on aurait pu penser que cette anticipation contractuelle serait possible, les partenaires fixant, dans la convention initiale, des directives pour calculer l'indemnité en cas de séparation. Néanmoins, la doctrine majoritaire ne l'entend pas de cette manière de sorte que la « contractualisation de la rupture du couple n'est finalement pas là où on l'attendrait naturellement : elle est dans le mariage bien plus que dans le Pacs ! »596. Si l'extension de la prestation compensatoire au Pacs réduirait l'intérêt d'y recourir – la liberté de rompre facilement celui-ci explique en grande partie son succès –, on pourrait laisser aux praticiens la possibilité de faire preuve de créativité notariale en proposant aux couples des clauses « sur-mesure » dans leur convention de Pacs597. Certains diront – et ils n'auraient pas tort – que le Pacs se rapproche dangereusement du mariage. Par ailleurs, il ne faudrait pas que de telles clauses aient pour effet de dissuader un partenaire de rompre. Le Pacs obéit au droit commun des obligations en raison de sa nature contractuelle. À ce titre, l'article 1210 du Code civil prohibe les engagements perpétuels. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs rappelé que « toute clause du pacte interdisant l'exercice [du] droit [de rompre] devra être réputée non écrite »598.

Vers un régime primaire impératif du couple ?

Des auteurs prônent la création d'un régime primaire applicable à tous les couples. Il serait fondé non pas sur le mariage ou le Pacs, mais tout simplement sur la notion de vie de couple599. Il contiendrait « des règles applicables de la même manière aux concubins, aux partenaires et aux époux ces règles seraient nécessairement impératives à l'image du régime primaire observé dans le mariage. Partant, seules des règles essentielles devraient être imposées »600. Si un tel statut ne devrait pas s'appliquer aux concubins601, serait-il opportun pour le Pacs et le mariage ? Dans la mesure où le mariage est désormais permis entre les personnes de même sexe, il n'est pas nécessaire de rapprocher encore davantage le Pacs du mariage – ou inversement. Chaque forme de conjugalité présente ses avantages et inconvénients. Rien n'empêche un couple de s'unir par le mariage s'il entend avoir une protection plus importante que celle offerte par le Pacs.