Les couples de femmes
Les couples de femmes
Les caractères de la reconnaissance conjointe anticipée
La RCA est reçue concomitamment à l'acte de consentement à l'AMP
Les effets de la reconnaissance conjointe anticipée
En cas de choix du nom lors de la déclaration de naissance | En cas d'absence de choix lors de la déclaration de naissance |
• Soit le nom de l'une d'elles. | L'enfant portera le nom de chacune d'elles. |
Reconnaissance conjointe et autorité parentale
Le rôle de l'officier d'état civil
Remise d'une seule copie authentique de la RCA
Les difficultés liées à la reconnaissance conjointe anticipée
Les dérives de la reconnaissance conjointe anticipée
- un lien de filiation peut être établi entre l'auteur du don – le géniteur – et l'enfant ;
- la responsabilité de l'auteur du don – le géniteur – peut être engagée ;
- toute action aux fins d'établissement ou de contestation de la filiation peut être exercée.
Le rôle du notaire
Les difficultés en présence d'un élément d'extranéité
Cas pratiques
<strong>– Premier cas : Deux femmes ont la nationalité française. Elles ont fixé leur résidence habituelle commune à l'étranger. Elles réalisent une AMP à l'étranger où l'enfant y est né. Comment la filiation sera-t-elle établie ou reconnue en France à l'égard des deux mères ?</strong> Dès lors que l'enfant est né à l'étranger, il convient de distinguer deux cas :
• une déclaration de naissance est faite au consulat à l'étranger. Pour établir la filiation des deux mères à l'égard de l'enfant, il convient de déterminer la loi applicable à l'établissement de la filiation. Selon l'article 311-14 du Code civil, « la filiation est régie par la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l'enfant ». Pour la mère qui a accouché, la loi française s'applique. Sa désignation dans l'acte de naissance établit sa filiation à l'égard de l'enfant. Pour celle qui n'a pas accouché et si l'on se réfère à l'article 311-17 du Code civil, « la reconnaissance (…) est valable si elle a été faite en conformité, soit de la loi personnelle de son auteur, soit de la loi personnelle de l'enfant ». C'est également la loi française qui s'applique pour celle qui n'a pas accouché<sup class="note" data-contentnote=" L'enfant qui sera issu de cette AMP sera également de nationalité française en vertu de l'article 18 du Code civil.">1068</sup>. Pour établir la filiation à son égard, la RCA prévue à l'article 342-11 du Code civil est obligatoire ;
• l'acte de naissance de l'enfant a été établi à l'étranger et sa filiation est établie à l'égard de ses deux mères conformément au droit local. Le couple de femmes a toujours la possibilité de demander la transcription de l'acte de naissance étranger sur les registres de l'état civil français. Néanmoins, en raison de la nouvelle rédaction de l'article 47 du Code civil qui impose que les faits qui y sont déclarés correspondent à la réalité, laquelle est appréciée au regard de la loi française, il n'est pas certain que ce couple puisse y procéder. Il leur est donc conseillé de signer, en France, un acte de consentement à l'AMP et une RCA avant la mise en œuvre de cette technique médicale à l'étranger.
Avant toute mise en œuvre d'une AMP exogène à l'étranger, il est conseillé aux couples de femmes, toutes deux de nationalité française, de consentir à celle-ci en application de l'article 342-10 du Code civil et de signer une RCA en vertu de l'article 342-11 du Code civil pour établir la filiation entre l'enfant qui sera issu d'une telle technique et la mère qui n'aura pas accouché. Elles devront par conséquent se rendre en France pour la signature de ces deux actes<sup class="note" data-contentnote=" V. <em>supra</em>, n<sup>o</sup> , pour l'impossibilité de signer une procuration authentique à distance pour la régularisation de ces deux actes.">1069</sup>. Ces préconisations sont identiques dans l'hypothèse où, au sein du couple, l'une des deux femmes a la nationalité française et l'autre une nationalité étrangère.
<strong>– Deuxième cas : Un couple de femmes dont l'une est de nationalité française, l'autre de nationalité étrangère, a réalisé une AMP à l'étranger avant l'entrée en vigueur de la loi bioéthique du 2 août 2021. L'enfant est né à l'étranger. La filiation établie à l'étranger à l'égard des deux mères est-elle reconnue en France alors que le dispositif transitoire prévu à l'article 6, IV de la loi du 2 août 2021 a expiré ?</strong> Un acte de naissance de l'enfant a été établi à l'étranger de sorte que c'est une question de transcription de cet acte sur les registres de l'état civil français qui se pose et non d'établissement d'un lien de filiation en France. Il n'est donc pas nécessaire de déterminer, au préalable, la loi applicable. En raison de la nouvelle rédaction de l'article 47 du Code civil, la transcription ne pourra être que partielle à l'égard de la mère, de nationalité française, qui a accouché. Pour l'autre mère, elle ne pourra recourir qu'à l'adoption de l'enfant ; étant précisé que les conditions de l'adoption sont soumises à la loi nationale de l'adoptant en application de l'article 370-3 du Code civil<sup class="note" data-contentnote=" V. <em>infra</em>, n<sup>o</sup> .">1070</sup>.
<strong>– Troisième cas : les deux femmes ont la nationalité française. Elles ont fixé leur résidence habituelle commune en France ou à l'étranger. Elles ont réalisé une AMP exogène à l'étranger avant l'entrée en vigueur de la loi bioéthique du 2 août 2021. </strong>Ces deux femmes avaient-elles la possibilité de signer un acte de reconnaissance conjointe <em>a posteriori</em> ? Comme indiqué ci-dessus, il semble possible de recourir à l'article 311-17 du Code civil. En conséquence, les deux femmes ayant la nationalité française, la loi française est compétente pour établir la filiation. Elles avaient donc la possibilité, jusqu'au 2 août 2024, de réaliser une reconnaissance conjointe <em>a posteriori</em>. La question aurait pu être plus délicate si l'une des deux femmes n'avait pas la nationalité française. Néanmoins, l'article 311-17 du Code civil prévoit que la reconnaissance est également valable selon la loi personnelle de l'enfant. Or, ce dernier a nécessairement la nationalité française puisqu'il est né d'un parent français<sup class="note" data-contentnote=" C. civ., art. 18.">1071</sup>. Dès lors, la loi française étant applicable, la reconnaissance conjointe <em>a posteriori</em> était possible.
<strong>– Quatrième cas : deux femmes, de nationalité étrangère, souhaitent réaliser une AMP en France ; cette technique étant interdite dans leur pays. Est-il nécessaire de signer un acte de consentement à l'AMP et une RCA ?</strong> Que l'on applique les articles 311-14 ou 311-17 du Code civil, la filiation sera établie selon le droit étranger. Si le recours à l'AMP est interdit dans le pays d'origine de ce couple, la filiation ne sera certainement pas établie entre l'enfant et la mère qui n'a pas accouché. Néanmoins, si ce couple de femmes réside habituellement en France, il lui sera conseillé de signer l'acte de consentement et la RCA. En effet, si le droit d'accès des couples de femmes à l'AMP venait à être envisagé comme une loi de police, cette dernière garantirait alors la validité de la reconnaissance établie en France. Elle suppose alors que le couple de femmes ait un lien étroit avec la France comme, par exemple, sa résidence habituelle. Enfin, la Cour de justice de l'Union européenne, dans un arrêt du 14 décembre 2021, a condamné la Bulgarie qui a refusé de reconnaître le lien de filiation de l'enfant issu d'une AMP pratiquée en Espagne par un couple de femmes en raison de l'interdiction, pour un tel couple, de fonder une famille, que ce soit par adoption ou par AMP<sup class="note" data-contentnote=" V. CJUE, 14 déc. 2021, aff. C490/2. – R. Legendre, <em>Filiation internationale, quelles perspectives en droit européen : AJF</em> 2023, p. 73.">1072</sup>. Pour la Cour, un tel refus porte une atteinte disproportionnée à la liberté de circulation.