– Plan. – Il convient de distinguer selon que la fin du couple survient à la suite d'une séparation (Sous-section I) ou d'un décès (Sous-section II).
Les conséquences lors de la fin du couple
Les conséquences lors de la fin du couple
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
La séparation du couple
– Une absence de droits. – En cas de séparation, le tiers n'a aucun droit à l'égard de l'enfant contrairement au parent légal excepté celui de solliciter le maintien des relations avec l'enfant (§ I). Par ailleurs, la séparation du couple n'entraîne pas, ipso facto, la fin de la délégation-partage qui a pu être consentie au cours de l'union (§ II).
Un droit au maintien des relations
– Un droit accordé dans l'intérêt supérieur de l'enfant. – L'article 371-4, alinéa 2, du Code civil permet à un tiers, parent ou non, de saisir le juge aux affaires familiales afin de fixer les modalités de ses relations avec l'enfant, « si tel est l'intérêt de ce dernier ». Ce texte vise en particulier le tiers qui « a résidé de manière stable avec lui et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables ». Ce texte permet ainsi le maintien des liens entre l'enfant et l'ancien conjoint, partenaire ou concubin de son parent, qu'il soit de même sexe ou de sexe différent, qu'il soit un beau-parent ou un parent d'intention. Ce maintien est toutefois conditionné à l'intérêt de l'enfant. La notion des « relations personnelles » n'étant pas définie par le législateur, il peut s'agir d'un droit de visite, voire d'un droit d'hébergement, ou tout simplement d'un droit de correspondance. Les juges du fond apprécient souverainement la situation lors de la rupture pour octroyer ou non au tiers ce droit au maintien des relations personnelles1546. Leur décision doit être prise dans l'intérêt supérieur de l'enfant « qui doit être une considération primordiale »1547.
Le maintien de la délégation-partage
– La nécessité de circonstances nouvelles. – La délégation-partage consentie au profit d'un tiers ne peut prendre fin, par un nouveau jugement, que « s'il est justifié de circonstances nouvelles »1548. Or, la séparation du couple n'est pas un motif suffisant pour opérer ce retrait, quand bien même l'accord ayant permis sa mise en place n'existe plus. Si la volonté du retrait est « exclusivement inspirée par des considérations d'ordre personnel et qu'il n'est pas établi que la séparation du couple a des répercussions négatives sur l'enfant », il n'y a pas lieu de mettre fin à la délégation de l'exercice de l'autorité parentale en l'absence de circonstances nouvelles1549. Pour un auteur, « la mesure de délégation d'autorité parentale place le beau-parent [et le parent d'intention] dans une relation privilégiée, le rapprochant de la véritable relation parentale. Après la séparation du couple, il n'a plus à démontrer sur le fondement de l'article 371-4 [du Code civil] qu'il va de l'intérêt de l'enfant d'entretenir des relations avec lui. Au contraire, c'est à l'autre parent d'établir des circonstances nouvelles permettant de justifier la fin de la mesure de délégation »1550.
Le décès de l'un des parents
– Une dévolution automatique au survivant des parents. – Si l'un des parents décède pendant la minorité de son enfant, le survivant exerce seul l'autorité parentale1551. Ce transfert de l'exercice de l'autorité parentale est automatique même si le parent décédé était le seul à l'accomplir de son vivant, excepté si le survivant en a été privé par une décision judiciaire antérieure1552.
– L'enfant confié au tiers à sa demande. – Le juge aux affaires familiales conserve toutefois la possibilité de confier l'enfant à un tiers en vertu de l'article 373-3 du Code civil. L'alinéa 1er lui permet, après avoir été saisi par la famille ou le ministère public, de décider, « à titre exceptionnel et si l'intérêt de l'enfant l'exige », de remettre celui-ci à un tiers, « choisi de préférence dans sa parenté ». Quant à l'alinéa 2, il lui permet d'anticiper cette remise à un tiers lorsqu'il statue sur les modalités de l'exercice de l'autorité parentale après séparation des parents. Il peut en effet « décider, du vivant même des parents, qu'en cas de décès de celui d'entre eux qui exerce cette autorité, l'enfant n'est pas confié au survivant. Il peut, dans ce cas, désigner la personne à laquelle l'enfant est provisoirement confié »1553. Ce dernier accomplit uniquement les actes usuels relatifs à sa surveillance et à son éducation ; les décisions portant sur les actes graves – les actes non usuels – étant prises par le parent ayant conservé l'autorité parentale alors même que l'enfant ne lui est pas confié. Le juge peut aussi imposer au tiers chargé de prendre soin de l'enfant, l'ouverture d'une mesure de tutelle1554. Si le décès du parent survient dans le cadre d'une famille monoparentale, l'article 373-5 du Code civil prévoit « qu'il y aura lieu à l'ouverture d'une tutelle » conformément à l'article 390 du Code civil.
Recours au ministère public
Le beau-parent ou le parent d'intention ne peuvent pas saisir directement le juge aux affaires familiales pour se voir confier l'enfant sur le fondement de l'article 373-3, alinéa 1er, du Code civil. Ils sont contraints, conformément à l'article 373-2-8 du même code, de saisir le ministère public qui saisira lui-même le juge aux affaires familiales.
– La tutelle testamentaire. – Les parents sont soucieux du devenir de leur enfant s'ils venaient tous deux à décéder pendant sa minorité. Cette crainte est d'autant plus prégnante dans le cadre d'une famille monoparentale. Le notaire conseille généralement au(x) parent(s) de désigner, par testament ou déclaration spéciale notariée, un tuteur, lequel peut être un parent ou non de l'enfant1555. Il peut être désigné comme tuteur à la personne et/ou aux biens1556. Il est alors chargé de prendre soin de l'enfant en assurant sa garde et son entretien et de gérer ses biens. La désignation d'un tuteur n'empêche pas la constitution d'un conseil de famille1557. Néanmoins, cette désignation s'impose à lui, sauf s'il est dans l'intérêt du mineur de l'écarter. De son côté, le tuteur peut refuser cette mission. À défaut de tutelle testamentaire, le tuteur est désigné par le conseil de famille1558.
Selon l'article 403 du Code civil, le droit individuel de choisir un tuteur n'appartient qu'au dernier vivant des père et mère s'il a conservé, au jour de son décès, l'exercice de l'autorité parentale. Dès lors, le testament désignant un tuteur aux biens et à la personne pour l'enfant mineur établi par le parent qui exerce seul l'autorité parentale – l'autre parent ayant été privé de cet exercice par décision de justice – peut-il s'appliquer s'il vient à décéder en premier ? Est visé expressément « le dernier vivant des père et mère » de sorte qu'une telle désignation par testament est inefficace1559
1560. Il est toutefois conseillé d'établir ce testament. En effet, le tuteur nommément désigné par testament conserve la possibilité de saisir le ministère public pour demander que l'enfant lui soit confié sur le fondement de l'article 373-3 du Code civil. Le fait d'avoir été désigné par le parent décédé lui permet de justifier, auprès du juge aux affaires familiales, de la confiance qui lui avait été accordée par le parent décédé.
Autorité parentale sur la personne et sur les biens de l'enfant
L'autorité parentale s'exerce à la fois sur la personne de l'enfant et sur ses biens. Lorsque l'autorité parentale est exercée en commun par les deux parents, chacun d'eux est administrateur légal de l'enfant1561. Ils ont également, jusqu'aux seize ans de l'enfant, un droit de jouissance légale1562, celle-ci étant attachée à l'administration légale qui constitue elle-même un attribut de l'autorité parentale. S'il est impossible pour un parent de priver l'autre de l'autorité parentale – cette privation ne peut être que judiciaire et résulter des cas prévus aux articles 378 et 378-1 du Code civil1563 –, il peut en revanche, s'il venait à décéder en premier, priver le survivant, par testament, de l'administration légale et du droit de jouissance en application de l'article 384 du même code. Cette privation ne peut porter que sur les biens qu'il lègue à son enfant mineur, lesquels doivent alors être administrés par un tiers.