L'admission de la transcription intégrale par la jurisprudence

L'admission de la transcription intégrale par la jurisprudence

Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Une transcription partielle au profit du parent d'intention biologique. – Jusqu'en 2014, la France refusait systématiquement la transcription d'un acte de naissance étranger sur les registres de l'état civil français – ou l'annulait si celle-ci avait été réalisée – dès lors que l'enfant était issu d'une GPA1180. Tirant les conséquences de la condamnation par la Cour européenne des droits de l'homme1181, la Cour de cassation a opéré, aux termes de deux arrêts en date du 3 juillet 2015, un revirement de jurisprudence1182. En écartant toute référence à la fraude, elle a autorisé la transcription intégrale de l'acte de naissance étranger d'un enfant né par GPA lorsque celui-ci désigne le père d'intention en qualité de père et la mère porteuse en qualité de mère1183. En effet, l'acte de naissance étranger de l'enfant n'étant ni irrégulier, ni falsifié et les faits qui y sont déclarés correspondant à la réalité, la Cour de cassation a admis « que [la] convention [de GPA] conclue à l'étranger n'empêche pas la reconnaissance des liens de filiation qui en découle » à l'égard du père d'intention, d'autant plus lorsque celui-ci a également la qualité de père biologique1184. En revanche, par deux arrêts du 5 juillet 20171185, elle s'opposait toujours à la transcription intégrale de l'acte de naissance étranger d'un enfant né par GPA lorsque celui-ci désigne la mère d'intention en qualité de mère. Les hauts magistrats ont alors précisé que « concernant la désignation de la mère dans les actes de naissance, la réalité, au sens de ce texte, est la réalité de l'accouchement ». Dès lors que la mère mentionnée dans l'acte de naissance étranger n'a pas accouché de l'enfant, celui-ci n'est pas conforme à la réalité. Il résulte de cette jurisprudence que l'acte de naissance étranger ne pouvait être transcrit que partiellement sur les registres de l'état civil français à l'égard du père d'intention à condition qu'il soit également le père biologique de l'enfant1186.
– La nécessité d'une reconnaissance en droit français d'un lien de filiation entre l'enfant issu de la GPA et sa mère d'intention. – Puis la Cour de cassation, dans sa formation plénière, a sollicité l'avis de la Cour européenne des droits de l'homme. Aux termes d'un avis rendu le 10 avril 20191187, la Cour européenne a indiqué que le droit au respect de la vie privée d'un enfant né d'une GPA réalisée à l'étranger, « requiert que le droit interne offre une possibilité de reconnaissance d'un lien de filiation entre cet enfant et la mère d'intention, désignée dans l'acte de naissance légalement établi à l'étranger comme étant la « mère légale » », et ce, même en l'absence de lien biologique à l'égard de celle-ci. Néanmoins, cette reconnaissance ne doit pas obligatoirement passer par la transcription de son acte de naissance étranger sur les registres de l'état civil français. Elle « peut se faire par une autre voie, telle que l'adoption de l'enfant par la mère d'intention, à la condition que les modalités prévues par le droit interne garantissent l'effectivité et la célérité de sa mise en œuvre, conformément à l'intérêt supérieur de l'enfant »1188.
– Une transcription intégrale au profit des deux parents d'intention. – Si, à la suite de cet avis rendu par la Cour européenne des droits de l'homme, la Cour de cassation a prononcé, dans un arrêt du 4 octobre 2019, la transcription intégrale des actes de naissance étrangers des enfants Mennesson tant à l'égard du père d'intention – père biologique – que de la mère d'intention, cette décision semblait alors « exceptionnelle » en raison « d'un contentieux qui [perdurait] depuis plus de quinze ans ». La transcription intégrale apparaissait alors comme la seule voie « permettant de reconnaître la filiation dans des conditions qui ne porteraient pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée » des enfants1189. Mais, par deux arrêts rendus le 18 décembre 20191190, la Cour de cassation a étendu cette solution en admettant la transcription intégrale de l'acte de naissance étranger de l'enfant issu d'une GPA sur les registres de l'état civil français désignant l'un des hommes en qualité de père et l'autre en qualité de parent, et ce, afin « d'unifier le traitement des situations ». En effet, selon la Haute juridiction, le « raisonnement n'a pas lieu d'être différent lorsque c'est un homme qui est désigné dans l'acte de naissance étranger comme « parent d'intention » ». En conséquence, dès lors que l'acte de naissance étranger est probant au sens de l'article 47 du Code civil dans sa version antérieure à la loi du 2 août 2021, c'est-à-dire qu'il n'est ni irrégulier, ni falsifié et que les faits qui y sont déclarés correspondent à la réalité, celui-ci doit être transcrit automatiquement sur les registres de l'état civil français à l'égard des deux parents d'intention.