– Option anormale. – La renonciation à succession est l'acte unilatéral par lequel l'héritier abdique ses droits successoraux. Parce qu'elle est une option « anormale », elle est donc particulièrement encadrée. Soumise à des conditions de forme et de fond rigoureuses, ce sont surtout ses effets qui appellent réflexion.
La renonciation à succession
La renonciation à succession
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Conditions de forme et de fond. – La renonciation est nécessairement expresse. Elle se fait sous la forme d'une déclaration présentée (ou déposée par courrier) au greffe du « tribunal dans le ressort duquel la succession s'est ouverte » (C. civ., art. 804, al. 2). Depuis la loi no 201-1547 du 18 novembre 2016, la renonciation peut être effectuée par acte notarié. L'ancienne controverse relative à la forme de la renonciation du légataire universel et à titre universel n'a plus lieu d'être depuis cette date, l'article 804 du Code civil visant désormais expressément tous les ayants droit tenus ultra vires. S'agissant des conditions de fond, l'acte est soumis au régime général de validité des actes juridiques (vices du consentement et capacité notamment). Le majeur sous tutelle ou le mineur ne peuvent renoncer sans autorisation du juge. La renonciation n'est pas possible si la succession a déjà été acceptée, fût-ce à concurrence de l'actif net. Elle est néanmoins révocable dans les limites du délai de prescription si la succession n'a pas été acceptée entre-temps par un autre héritier, ou l'État envoyé en possession502.
– Effets de la renonciation. – Depuis la loi du 23 juin 2006, il convient de distinguer les effets de l'option sur le renonçant lui-même, des effets sur les successibles. À l'égard du renonçant, selon les termes de l'article 805, alinéa 1 du Code civil : « L'héritier qui renonce est censé n'avoir jamais été héritier ». Il est donc délivré de son obligation aux dettes et du rapport des libéralités, sauf exceptions. À l'égard des autres successibles, l'abdication profite en ligne directe et en ligne collatérale privilégiée aux descendants du renonçant, par le jeu de la représentation et, dans tous les autres cas (héritiers ab intestat en ligne collatérale simple ou légataires), la renonciation accroît la part des autres successibles.
– Limites successorales de la renonciation. – Désormais, l'héritier renonçant n'est « plus totalement étranger à la succession »503. Le nouveau principe de représentation des successibles renonçants permet de tenir compte de sa personne pour fixer le taux de la réserve et impose à ses héritiers le rapport des libéralités reçues par leur auteur504. Le disposant peut néanmoins, par exception, obliger le gratifié renonçant à rapporter les libéralités reçues nonobstant son option.
Il est précisé en outre que la renonciation n'a pas d'effet sur les contrats d'assurance-vie et assurance décès dévolus au bénéficiaire indépendamment de toute option et de tout régime fiscal applicable.
– Limites extrapatrimoniales de la renonciation. – Les autres limites de la renonciation sont extrapatrimoniales. « Parce qu'on ne choisit pas ses parents, on ne choisit pas sa famille », il est certains droits et certaines obligations que l'on ne perd pas en renonçant. L'exemple le plus manifeste se trouve en propriété littéraire et artistique. Les descendants de l'écrivain ou de l'artiste décédé ou, à défaut, le conjoint survivant, conservent en succession ab intestat, quelle que soit leur option, le droit moral et notamment l'exercice du droit de divulgation505. Le droit au bail habitation, bail commercial et bail rural obéit également à des règles spécifiques permettant au renonçant de s'en prévaloir506. De même, le droit temporaire au logement, effet du mariage ou du Pacs, est maintenu au profit du conjoint et du partenaire renonçant dans les termes de l'article 763 du Code civil. Certains objets, enfin, obéissent à une dévolution particulière, comme les souvenirs de famille sans valeur pécuniaire ou le caveau de famille507, tandis que d'autres, liés à la mémoire du défunt et aux liens du sang, se transmettent indépendamment de toute vocation successorale (droit de défendre le nom, la mémoire). Quant aux frais funéraires, s'ils ont été engagés par l'héritier renonçant après sa renonciation, ils restent à sa charge.