– Verba volant, scripta manent
. – Les notaires, par leur fonction, sont très attachés à l'écrit et à sa conservation. Leur tropisme naturel les rend méfiants à l'égard de toute manifestation purement verbale. Ils sont ainsi des acteurs essentiels de la conservation durable de la mémoire en une société naturellement de plus en plus tournée vers l'éphémère et le virtuel. L'intelligence artificielle, qui rendra peut-être difficile à l'avenir le discernement entre le vrai et le faux, renforce encore cette nécessité. Ces propos de portée générale sont essentiels : le notariat, dans ses fonctions régaliennes, est et doit demeurer un bastion de l'écrit non falsifiable, en matière testamentaire plus qu'en toute autre. L'expression « les paroles s'envolent, les écrits restent », attribuée à Caius Titus, sénateur romain du I
er siècle, revêt un intérêt renouvelé à l'ère 2.0.
La question du testament oral
La question du testament oral
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Nullité du testament verbal. – La génération Z plonge à cet égard ses aînés dans une perplexité bien compréhensible. Certains notaires ont été consultés pour des testaments laissés par voie de SMS et par messagerie téléphonique. Confrontés à un danger de mort immédiat, les jeunes n'ont pas le réflexe d'écrire mais de dicter à leur téléphone leurs dernières volontés. La question est tragique. Comment ne pas tenir compte de cette parole post mortem enregistrée, qui a l'inflexion des voix chères qui se sont tues ?
En l'état actuel du droit positif, le testament verbal ou nuncupatif est nul, de nullité absolue, même enregistré ou sur support visuel. La multiplication des deep fake (en français « hypertrucage ») à l'avènement de l'intelligence artificielle rend la règle sûre. Néanmoins rien n'empêche l'entourage, investi de l'intime conviction qu'il s'agit bien de la volonté du défunt, d'exécuter spontanément la disposition au titre d'une obligation naturelle. Le notaire procédera par voie de délivrance de legs verbal en présence de témoins et sur réquisition des héritiers du sang et de toute personne qui aurait un intérêt à contester la volonté orale. Une telle exécution vaut renonciation à se prévaloir de la nullité de forme et n'est point considérée comme une libéralité entre le renonçant et le bénéficiaire.