– Le rôle du beau-parent. – Les termes de « famille recomposée », « beau-parent », « demi-frère ou demi-sœur » n'existaient pas en France avant 1985. Même si les familles recomposées sont présentes depuis toujours au sein de la société française, « elles n'avaient ni nom, ni nombre, ni aucune autre forme de reconnaissance sociale. Elles étaient la part invisible de la famille contemporaine »091. Elles ont été mises sur le devant de la scène en raison du nombre croissant de divorces. En effet, si la présence d'un beau-parent au sein d'une famille recomposée était autrefois la conséquence d'un veuvage précoce092, de telles familles sont principalement la conséquence, de nos jours, d'un divorce ou d'une séparation des parents093. Le mauvais rôle tenu par le beau-parent, décrié dans les contes pour enfants, s'est peu à peu transformé en une véritable démarche parentale. Le beau-parent s'est alors substitué au parent qui avait laissé sa place vacante auprès de l'enfant à la suite d'une séparation. Néanmoins, son rôle est aujourd'hui pensé de manière différente. Le beau-parent ne cherche pas nécessairement à prendre la place du parent biologique qui ne vit pas au quotidien avec l'enfant. Il peut juste souhaiter exercer une fonction parentale « aux côtés » des deux parents biologiques de l'enfant.
La place du beau-parent
La place du beau-parent
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Une progression du nombre d'enfants vivant en famille recomposée. – « Si la part des familles recomposées au sein de l'ensemble des familles avec enfants a progressé entre 1975 et 1999, elle est restée globalement stable depuis une vingtaine d'années »094. Néanmoins, le nombre d'enfants vivant en famille recomposée augmente, de même que celui des beaux-parents. Selon l'INSEE, « 800 000 beaux-parents vivent avec des enfants que leur conjoint a eus avant l'union » en 2019095.
La composition des familles en 2020 ressort à 1,8 enfant par famille monoparentale, 1,9 enfant par famille traditionnelle et 2,4 enfants par famille recomposée. Cette dernière a, en moyenne, plus d'enfants que les autres familles. 38 % des familles recomposées sont d'ailleurs considérées comme des familles nombreuses (trois enfants ou plus au domicile).
L’évolution du cadre de vie des enfants entre 2000 et 2020
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Source : Graphiques établis par M. Jérémy Houssier dans le cadre de son audition de janvier 2024 à partir des données fournies par l'INED et le Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge096.
– Une question qui divise. – Avec l'augmentation croissante du nombre de familles recomposées, des sociologues et juristes se sont penchés sur la place du beau-parent au sein de la famille097. En effet, comme l'évoque un auteur, « comment appréhender en droit le rôle que le beau-parent est amené à jouer en fait auprès de l'enfant ? »098. Dès 1998, Irène Théry écrivait qu'en raison de la diversité des situations familiales tenant à la fois aux origines de la recomposition familiale – divorce, séparation ou veuvage – ainsi qu'aux liens existant entre le beau-parent et l'enfant099, « il ne saurait être question d'élaborer un quelconque statut du beau-parent, qui ne pourrait que fragiliser les parents, et unifierait abusivement des situations fortement hétérogènes »100. En 1999, le rapport de Françoise Dekeuwer-Défossez indiquait que même si les situations de recomposition familiale étaient de plus en plus fréquentes, il ne semblait alors pas « opportun que soient prévues des règles propres aux beaux-parents », préconisant davantage l'élaboration d'un statut de tiers101. À la suite d'un rapport établi en 2006 sur « l'enfant au cœur des nouvelles parentalités », Dominique Versini insistait, quant à elle, pour la création d'un « statut des tiers qui partagent ou ont partagé la vie d'un enfant et ont de liens affectifs forts avec lui », visant expressément le « beau-parent », lequel est également appelé, par certains, le « quasi-parent »102. Au printemps 2009, un avant-projet de loi sur l'autorité parentale et le statut des tiers avait été présenté dans le but de renforcer le rôle du beau-parent ainsi que celui du partenaire ou du concubin homosexuel du parent d'un enfant. Toutefois, il n'a pas abouti à la suite d'un rapport remis le 8 octobre 2009 au Premier ministre par M. Jean Leonetti. Ce dernier a démontré l'inopportunité d'accroître le rôle des tiers au regard de l'intérêt de l'enfant103.
– Une pluralité de situations de recomposition familiale. – Les situations sont tellement diverses dans les familles recomposées qu'il est bien difficile d'appréhender en droit la place du beau-parent104. Néanmoins, les outils juridiques proposés aujourd'hui sont inadaptés à certaines configurations familiales105. Que penser de l'adoption dont l'objectif est de créer un lien de filiation entre l'enfant et le beau-parent alors que ce dernier n'a pas le souhait de se substituer aux parents ? Par ailleurs, ne serait-il pas possible de contractualiser la délégation-partage de l'autorité parentale au profit du beau-parent en présence d'un accord de volonté ? Les travaux du 121e Congrès reviennent sur la place du beau-parent au sein des tribus familiales.
– Le beau-parent, à l'heure de la transmission. – Lorsque le bel-enfant a été élevé au sein d'une fratrie recomposée, le beau-père ou la belle-mère peut vouloir concrétiser sa relation par une transmission patrimoniale. Or, sans passer par l'établissement d'une filiation adoptive, la taxation à 60 % s'avère excessivement sévère. N'est-il pas nécessaire d'amorcer une réflexion sur le barème fiscal des droits de mutation à titre gratuit entre bel-enfant et beau-parent106 ?