– Définition. – L'article 384, alinéa 1er du Code civil dispose que : « Ne sont pas soumis à l'administration légale les biens donnés ou légués au mineur sous la condition qu'ils soient administrés par un tiers ». Cette disposition permet ainsi d'écarter l'administration légale des père et mère sur les biens donnés ou légués à un mineur et de désigner pour ce faire un tiers administrateur. Ce dispositif est peu contraignant et la Cour suprême respecte à la lettre ce texte, écartant toute restriction non prévue par la loi. C'est ainsi qu'elle a admis que la clause n'a pas à être motivée ou justifiée par un intérêt sérieux et légitime, allant même jusqu'à préciser que l'intérêt de l'enfant n'a pas à être recherché pour que cette désignation soit efficace. Pour autant, l'intérêt de l'enfant est suffisamment protégé par le régime puisque l'alinéa 3 du même article prévoit que le juge des tutelles peut remplacer l'administrateur désigné par un administrateur ad hoc si, au cours de sa mission, celui-ci venait à ne pas respecter l'intérêt du mineur du fait de son inaptitude, de sa négligence, de son comportement frauduleux, ou s'il entrait en conflit d'intérêts avec le mineur.
Intérêt du dispositif
Intérêt du dispositif
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Motivations. – Les motivations pour le disposant d'user de ce dispositif peuvent être diverses. Il s'agit le plus souvent d'une mesure de défiance à l'égard du parent survivant du mineur, notamment dans le cadre de familles séparées ou divorcées. Mais elles peuvent au contraire résulter d'une volonté bienveillante à l'égard de l'administrateur légal dans le but soit de le soulager d'une gestion compliquée, soit de lui accorder conventionnellement des pouvoirs plus larges sur les biens légués que ceux qu'il tiendrait de la loi. L'esprit de cette disposition est d'éviter que l'enfant pâtisse de la mésentente entre ses parents et de favoriser les libéralités faites à un mineur. Sachant que les biens laissés à son décès ne seront pas gérés par le parent survivant, le de cujus n'a alors pas de raison de limiter la transmission de son patrimoine à ses enfants encore mineurs. Comme l'a souligné le professeur Cornu, « l'intérêt de l'enfant prime la vocation des parents ».
– Effets sur la jouissance légale. – En principe, la jouissance légale est attachée à l'administration légale. Selon les dispositions prévues aux articles 386-1 et 386-2 du Code civil, tant que le mineur n'a pas atteint l'âge de seize ans, l'exclusion de l'administration légale emporte celle de la jouissance légale, qui jusqu'à cet âge, y est attachée. Autrement dit, le parent survivant privé de l'administration légale est privé également de l'usufruit légal sur les biens hérités par son enfant mineur. C'est l'enfant qui percevra alors les fruits et revenus des biens qui lui ont été légués. Mais la privation de l'administration légale peut être traitée distinctement de la privation de la jouissance légale. L'auteur de la libéralité a la faculté de n'exclure que la jouissance légale prévue à l'article 387 du Code civil. Dans un tel cas, le parent écarté pourrait toutefois exiger que certaines sommes lui soient allouées afin qu'il puisse subvenir aux besoins de l'enfant. À l'inverse, un parent peut souhaiter priver l'autre de la seule administration légale des biens du mineur, du fait par exemple de la gestion difficile du patrimoine, tout en maintenant sa vocation aux fruits et revenus. À défaut de précision, l'exclusion de l'administration emportera privation de l'usufruit légal.
– Effets sur les biens subrogés. – Bien qu'il ne semble guère être contesté que la mission du tiers administrateur s'étend aux biens subrogés aux biens légués (ou donnés), il sera préférable de prévoir expressément cette subrogation dans la clause écartant l'administration légale, pour éviter tout risque de contentieux.