Le recours à une société civile adossée à un démembrement du droit de propriété

Le recours à une société civile adossée à un démembrement du droit de propriété

Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
– Un outil efficace de transmission de patrimoine. – La combinaison du démembrement du droit de propriété et du droit des sociétés aboutit à un résultat efficace en matière de transmission de patrimoine. La pratique s'est emparée de cette technique. Toutefois, le praticien doit rester vigilant face, notamment, au risque de requalification en abus de droit. Malgré les récentes évolutions, la loi et la jurisprudence restent parfois lacunaires. Il est souvent difficile de dessiner un régime juridique et fiscal cohérent du démembrement de droits sociaux. La pratique a recours à différents schémas. Sont présentés certains schémas ayant un objectif de transmission au sein de la famille. Ces techniques sont modulables en fonction de la composition de chaque famille.
– Un outil à utiliser avec précaution. – Face aux risques, tant sur le plan civil que fiscal, que présentent en l'état les différentes formes d'apports de droits démembrés058, le démembrement a posteriori paraît être la technique à privilégier. L'hypothèse classique est celle de l'apport en pleine propriété à une société suivi d'une donation de parts sociales avec réserve d'usufruit. Une société est constituée. Le bien objet de la transmission est apporté. Il peut s'agir d'un bien immobilier. Une société civile immobilière (SCI) est alors privilégiée, notamment en raison de sa souplesse. Lorsque l'objet de l'apport est une entreprise, il est constitué en pratique une société commerciale, à savoir une société à responsabilité limitée ou une société par actions simplifiée.
– L'apport de droits démembrés, une technique à éviter. – Il peut encore être envisagé l'apport de la nue-propriété du bien à la société puis la donation des parts sociales.
L'objet de l'apport est alors la nue-propriété ou l'usufruit d'un bien. L'apport emporte transfert de propriété au profit de la société. Il peut être isolé ou conjoint.
En cas d'apport isolé de l'usufruit d'un bien, la durée de ce dernier est limitée à trente ans en vertu de l'article 619 du Code civil et ne saurait être supérieure à la durée de l'usufruit apporté.
L'apport de la nue-propriété d'un bien peut s'inscrire dans une stratégie patrimoniale. La validité d'un tel apport laisse certains auteurs dubitatifs. Une société constituée uniquement de la nue-propriété d'un bien ne répondrait pas aux conditions prévues à l'article 1832 du Code civil, qui énonce notamment que : « La société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d'affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter ».
Le critère du partage des bénéfices ne serait pas satisfait. Cette thèse ne peut être approuvée. En effet une société même constituée uniquement par la nue-propriété d'un bien a vocation à faire des bénéfices. Par ailleurs, la situation est temporaire puisque la société devient propriétaire lors de l'extinction de l'usufruit.
Suite à la constitution de la société, le schéma consiste ensuite à donner la nue-propriété des parts sociales. Un double démembrement s'opère. Toutefois le notaire doit redoubler de prudence face à la menace de l'abus de droit. Celui-ci pourrait conduire à remettre en cause ce montage059. L'apporteur d'un droit isolé reçoit, en contrepartie de son apport, des droits sociaux en pleine propriété en fonction de la valeur du bien apporté. En cas d'apport isolé de l'usufruit, son extinction n'emporte pas de conséquence sur la titularité des droits sociaux.
L'apport peut aussi être conjoint, les droits s'additionnent. La société est propriétaire du bien. En cas d'apport conjoint, la possibilité de reporter le démembrement sur les droits sociaux a suscité des divergences d'opinions. Aujourd'hui il est admis que le report du démembrement s'effectue par le mécanisme de la subrogation réelle.
Concernant l'évaluation de l'apport, la valeur de la nue-propriété ou de l'usufruit est déterminée en fonction de sa valeur économique et non du barème prévu à l'article 669 du Code général des impôts.