– Plan. – Techniquement, un OBO peut se limiter à une opération de vente (Sous-section I). Mais il constitue souvent l'antichambre d'une transmission à titre gratuit (Sous-section II). Chacune de ces étapes doit faire l'objet d'une grande vigilance.
La mise en œuvre vigilante de l'OBO
La mise en œuvre vigilante de l'OBO
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
La réalisation de la vente
– Les risques liés à la détermination du prix. – La fixation du prix de vente est une donnée essentielle en matière d'OBO. Le praticien doit observer une très grande vigilance en s'assurant que le prix correspond à la valeur vénale du bien. Le risque de préemption hante toujours les OBO, que le droit de préemption émane d'une collectivité ou d'un locataire commercial.
Sur le plan fiscal, le danger est évidemment celui d'une rectification fiscale au titre des droits de mutation à titre onéreux. Il a été vu précédemment que le risque d'une rectification au titre de l'IFI était toujours à considérer. Mais il existe également le risque d'une rectification au titre des droits de mutation à titre onéreux si le prix ne correspond pas à la valeur vénale101.
– Le risque de rectification fiscale au titre des droits de mutation à titre gratuit. – Une rectification fiscale aux droits de mutation à titre onéreux ne présente pas toujours un grand intérêt pour les finances de l'État. Le droit de vente est en effet perçu majoritairement par les départements, l'État ne recouvrant que les frais d'assiette. Une solution alternative consiste à requalifier la vente en donation déguisée de façon à provoquer l'application des droits de mutation à titre gratuit. L'intérêt est manifeste : d'une part, les droits de mutation à titre gratuit sont perçus au bénéfice de l'État ; d'autre part, le taux est de 60 % en raison de l'interposition d'une société familiale.
Le risque est particulièrement avéré si l'on se réfère au contentieux fiscal le plus récent102. La rectification est mise en œuvre dans le cadre de la procédure de répression des abus de droit, ce qui permet à l'administration d'appliquer une pénalité de 80 % sur le montant des droits éludés (dont le taux est fixé à 60 %).
La réalisation de la donation
– L'entrée des enfants dans la société. – Une question embrume souvent les esprits : à quel stade faut-il « faire entrer » les enfants dans la société ? À notre sens, tout dépend des circonstances et notamment de l'extension que connaîtra l'OBO.
Dans certains cas en effet, l'OBO se limite à une simple vente effectuée au profit d'une société familiale. Le but de l'opération est alors de percevoir des liquidités en franchise d'impôt de plus-value et de diminuer la charge d'impôt sur le revenu compte tenu de la disparition des impôts fonciers. Dans cette configuration, l'OBO n'ira pas plus loin : aucune donation ne sera effectuée au profit des enfants. Dans ce cadre, il est important que les enfants soient associés dans la société dès sa constitution afin de diminuer le risque de fictivité de la société.
Dans d'autres cas, l'OBO connaîtra une extension maximale : la donation des droits sociaux sera effectuée rapidement après l'acquisition du foncier. Dans ce cadre, l'entrée des enfants se produira au stade de la donation, la société ayant été constituée initialement par les parents.
– La donation à effet de levier. – Ainsi que cela a été indiqué ci-avant, la donation des droits sociaux préservera les abattements en ligne directe puisque la valeur nette comptable de la société sera très faible. Cet effet de levier est un marqueur très fort de l'OBO mais il produit une influence sur l'ensemble de la stratégie patrimoniale : la préservation des abattements permettra de les utiliser dans le cadre de donation de biens qui ne se prêtaient pas à l'OBO (biens contenant de fortes plus-values latentes).
– La justification civile de l'opération. – Le risque d'abus de droit fiscal ne doit pas être écarté. Il est certainement nécessaire de recenser l'ensemble des circonstances qui pourront expliquer l'intérêt civil et économique que peut représenter le schéma. Notons que le recours à une société peut se justifier pour une raison très simple : il permet d'organiser une donation-partage là où la transmission d'un bien immobilier n'aurait autorisé qu'une donation en indivision.
– Les préoccupations fiscales ne doivent pas décider de tout. – Transmettre un patrimoine à ses enfants en maximisant la fiscalité ne doit pas conduire à oublier les risques civils de l'opération. L'entrée des enfants dans une structure endettée doit faire l'objet d'une réflexion particulière. L'absence de versement de loyers, suite au départ du locataire ou suite à l'ouverture d'une procédure collective à son profit, met en péril le remboursement de la dette bancaire. Si la société est à responsabilité limitée, le risque patrimonial est moins grand pour les associés, d'autant que la banque qui finance l'opération demande rarement le cautionnement de ceux-ci : elle bénéficie en effet d'un nantissement sur les placements financiers du vendeur. Le risque sera nettement plus élevé si la société dont les titres ont été donnés est une société civile. Le notaire obtiendra utilement une renonciation de la banque à poursuivre les enfants, une telle renonciation ne posant pas de difficulté si une partie du prix de vente est nantie à son profit.
Enfin, le notaire doit déployer une attention particulière dans la rédaction des statuts en optimisant la répartition des prérogatives politiques et financières des associés sur les droits sociaux. Par ailleurs, il sera particulièrement opportun de laisser des parts en pleine propriété tant à l'usufruitier qu'au nu-propriétaire afin de favoriser d'utiles stratégies sur l'affectation des bénéfices de la société103.
– La problématique des comptes courants en démembrement de propriété. – Les OBO portant sur des immeubles d'une valeur importante peuvent entraîner l'apparition de crédits-vendeurs, et donc l'apparition de comptes courants pour des montants considérables. L'enjeu se comprend aisément : lorsque le compte courant est d'un faible montant, il existe une forte probabilité que la société ait remboursé non seulement la dette bancaire, mais également le compte courant avant le décès des parents. Dans ce cadre, aucune créance en compte courant ne sera à déclarer dans la succession. Si, en revanche, le montant de la créance en compte courant est important et que l'âge des parents est plus avancé, il existe le risque que le compte courant ne soit pas intégralement remboursé. Les droits de succession seront alors perçus sur la créance en compte courant. Pour cette raison, la pratique a envisagé par le passé de réaliser des donations de créance de compte courant en nue-propriété. La créance étant donnée, elle ne figure plus dans le patrimoine successoral et le remboursement perçu par l'usufruitier fait l'objet d'un quasi-usufruit déductible lors de son décès.
Cette stratégie paraît être remise en cause aujourd'hui par l'interprétation extensive que l'administration a adoptée s'agissant des dispositions de l'article 774 bis du Code général des impôts104.