– Contrôler le « clan » des indivisaires. – La convention d'indivision présente un dernier atout, assez peu connu, mais dont l'intérêt pratique est pourtant essentiel. Afin de prévenir l'émiettement de l'indivision et la superposition de droits indivis, la loi permet en effet d'aménager la transmission des droits indivis en cas de décès, à travers deux dispositifs qui, bien utilisés, vont permettre de contrôler le « clan » des indivisaires : la faculté d'acquisition ou d'attribution au profit des indivisaires survivants (§ I) ou d'un héritier de l'indivisaire décédé (§ II).
Aménagement de la dévolution des droits indivis
Aménagement de la dévolution des droits indivis
Rapport du 121e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2025
Faculté d'acquisition ou d'attribution au profit des indivisaires survivants
– Favoriser la transmission au sein des membres originaires de l'indivision. – Les indivisaires peuvent tout d'abord convenir « qu'au décès de l'un d'eux, chacun des survivants pourra acquérir la quote-part du défunt (…) »743. Cette faculté permet de favoriser la transmission au profit des membres originaires de l'indivision744. En réalité, ses effets sont triples : premièrement, elle évite l'émiettement de l'indivision ; deuxièmement, elle évite la superposition de droits indivis ; troisièmement, elle tend à favoriser la disparition de l'indivision par réduction du nombre d'indivisaires745. Le régime mis en place sur ce point par la loi de 1976 n'est d'ailleurs pas sans rappeler, en plus restrictif, certaines dispositions applicables à la dévolution des parts au sein des sociétés civiles746, dont il s'inspire directement747.
Faculté d'acquisition ou d'attribution au profit d'un héritier de l'indivisaire décédé
– Sélectionner les membres de l'indivision. – En cas de décès d'un indivisaire, la convention peut également prévoir « (…) que le conjoint survivant, ou tout autre héritier désigné, pourra [se faire attribuer la quote-part du défunt] à charge d'en tenir compte à la succession d'après sa valeur à l'époque de l'acquisition ou de l'attribution »748. Comme la précédente, cette faculté permet d'éviter l'émiettement de l'indivision et la superposition de droits indivis. Elle s'en distingue cependant sur trois points. Premièrement, elle n'a qu'un seul bénéficiaire749. Deuxièmement, elle peut provoquer l'élargissement du cercle des indivisaires750, notamment en faveur du conjoint survivant de l'indivisaire décédé. Troisièmement, elle préserve l'équilibre des pouvoirs au sein de l'indivision, puisqu'elle ne modifie pas la répartition des droits indivis.
En fait, la faculté d'acquisition ou d'attribution agit comme une sorte d'agrément ; suivant un mécanisme comparable à ce qu'a prévu le législateur dans les sociétés civiles, elle va permettre de sélectionner les membres de l'indivision et, ainsi, de favoriser la cohésion du groupe autour d'un projet commun.
Faculté d'acquisition ou d'attribution des droits indivis de l'indivisaire décédé : un régime complexe et lacunaire
Les textes ne disent pas grand-chose du régime de la faculté d'acquisition ou d'attribution des droits indivis de l'indivisaire décédé, qui se révèle à la fois complexe et lacunaire. Il faut commencer par observer qu'il s'agit d'une simple faculté : son bénéficiaire peut donc l'accepter ou la refuser751. Ensuite, la faculté d'acquisition ou d'attribution peut tout d'abord se trouver court-circuitée par les règles de l'attribution préférentielle752, ce qui vient tout à la fois en complexifier la mise en œuvre et en réduire la portée. Enfin, le Code civil donne quelques précisions sur l'évaluation des droits de l'indivisaire décédé753, sur l'exercice simultané de la faculté d'acquisition ou d'attribution754, et sur le délai dans lequel celle-ci doit être mise en œuvre755. À cet égard, on relèvera qu'en cas de caducité de la faculté d'acquisition ou d'attribution, « la convention d'indivision [est] réputée conclue pour une durée indéterminée à compter de l'ouverture de la succession »756. C'est dire que le bénéficiaire dispose d'un redoutable moyen de pression si le prix ou les conditions proposés ne lui conviennent pas : il lui suffira d'attendre, pour pouvoir dénoncer la convention et provoquer le partage… Pour le surplus, les textes ne disent rien de la procédure à suivre pour l'exercice de la faculté d'acquisition ou d'attribution. Sans doute ces aspects auront-ils vocation à être réglés par la convention d'indivision757.