La conservation de la valeur du logement en cas fin du contrat

La conservation de la valeur du logement en cas fin du contrat

Rapport du 119e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2023
Autre particularité importante du BRS, la valeur du droit de propriété du logement reste dans le patrimoine du preneur et donne droit à une indemnisation par l’OFS dans tous les cas de fin du BRS, selon les modalités fixées au contrat.
C’est ce qu’affirment de manière très claire les six articles relatifs à la question de la fin ou de la résiliation du BRS :
  • en cas de sinistre sans reconstruction de l’immeuble : « En cas de sinistre entraînant résiliation du bail, le preneur est indemnisé de la valeur de ses droits réels, dans les conditions prévues par le bail » (CCH, art. L. 255-7, al. 7) ;
  • en cas de résiliation pour faute : « À défaut pour le preneur d’exécuter ses obligations contractuelles, notamment en cas de défaut de paiement de la redevance, le bail est résilié, après indemnisation de la valeur des droits réels immobiliers tenant compte du manquement ayant entraîné la résiliation du bail, selon les modalités prévues au contrat » (CCH, art. L. 255-8, al. 2) ;
  • en cas de refus d’agrément lors d’une cession : « Le bail réel solidaire peut être résilié conventionnellement et le preneur est indemnisé de la valeur de ses droits réels immobiliers, dans les conditions prévues par le bail » (CCH, art. L. 255-13) ;
  • en cas de refus d’agrément lors d’une succession : « À défaut de cession dans ces délais, le bail réel solidaire est résilié et l’ayant droit est indemnisé par l’organisme de foncier solidaire de la valeur de ses droits réels immobiliers, dans les conditions prévues par le bail » (CCH, art. L. 255-14, al. 3) ;
  • en cas de préemption : « Le preneur est indemnisé de la valeur de ses droits réels immobiliers dans le respect des modalités de calcul du prix de vente stipulées dans le bail et de la valeur maximale mentionnée à l’article L. 255-5 » (CCH, art. L. 255-15, al. 2) ;
  • en cas d’expiration du BRS : « À l’expiration du bail, les droits réels immobiliers du preneur deviennent la propriété de l’organisme de foncier solidaire après indemnisation de la valeur de ses droits réels immobiliers, dans les conditions prévues par le bail et dans la limite de la valeur maximale mentionnée à l’article L. 255-5 » (CCH, art. L. 255-16, al. 1) ;
L’article R. 255-5 du Code de la construction et de l’habitation rappelle que la méthode de calcul des indemnités doit figurer dans les BRS : « Les méthodes d’évaluation des indemnisations de la valeur des droits réels prévues aux articles L. 255-7, L. 255-8 et L. 255-13 à L. 255-16 sont prévues par le contrat de bail », ce qui en soi n’apporte rien par rapport aux textes cités… Mais cet article ajoute que « le preneur est indemnisé dans un délai de six mois à compter de la notification par l’organisme de foncier solidaire de sa décision conduisant à indemnisation ou à compter de la date d’expiration du bail ».
Les cas de fin et de résiliation n’appellent pas de remarques particulières en dehors de celles suivantes relatives au cas du sinistre (I), à la procédure de résiliation pour faute (II) et à la pratique de la décote et de la clause de rencontre mises en place par de nombreux OFS (III), ainsi qu’à la question du sort des baux en fin de BRS (IV).

Cas du sinistre

Comme nous l’avons vu, et de manière classique, l’article L. 255-7 du Code de la construction et de l’habitation impose au preneur une obligation de maintien en bon état d’entretien et de réparations, avec une obligation de reconstruction (qui est couverte par les assurances multirisques usuelles) sauf destruction par cas fortuit ou force majeure, ou par un vice de la construction antérieur au bail.
Par ailleurs, les modèles existants de BRS prévoient à l’instar de la pratique des baux à construction une résiliation du BRS en cas d’impossibilité de reconstruction.
Ainsi, « en cas de sinistre entraînant résiliation du bail, le preneur est indemnisé de la valeur de ses droits réels, dans les conditions prévues par le bail ». De manière logique, dans un tel cas, le BRS étant résilié du fait de la disparition de son objet, il est prévu que l’indemnité d’assurance soit versée à l’OFS qui doit à son tour indemniser le preneur du fait de la résiliation. Or la pratique fixe la plupart du temps l’indemnité au montant du prix d’acquisition des droits réels, indexés, mais dans la limite de l’indemnité d’assurance perçue. Ce qui laisse au moins deux questions non traitées, sur lesquelles les notaires doivent attirer l’attention de leurs clients OFS :
  • d’une part, l’OFS doit verser l’indemnité dans les six mois de la date d’expiration du bail (qui n’est pas forcément à la date à laquelle il aura perçu l’indemnité), ce qui peut générer une difficulté importante de trésorerie ;
  • d’autre part, plafonner l’indemnité au montant de l’assurance perçue, souvent égale à la valeur de reconstruction à neuf, vétusté déduite, peut poser un problème lorsqu’il peut être anticipé que l’indemnité d’assurance ne peut pas être égale à la valeur des droits réels. Par exemple : en zone Abis, le plafond de prix de 5 502 €/m² pourrait être supérieur à une valeur de reconstruction à neuf (disons 3 000 €/m²), la valeur du terrain n’étant pas assurée et restant dans le patrimoine de l’OFS. Ces clauses risquent donc de générer une perte pour les ménages.

Procédure de résiliation pour faute

La question de la procédure de résiliation a été posée à l’occasion de la rédaction des premiers modèles : cette résiliation doit-elle être judiciaire ? de plein droit ? unilatérale ? Les pratiques sont divergentes. De nombreux commentateurs considèrent que compte tenu des nombreuses protections qui entourent le logement, la résiliation ne peut être que judiciaire. Néanmoins, l’article L. 255-6 du Code de la construction et de l’habitation dispose que « le bail réel solidaire ne peut prévoir aucune faculté de résiliation unilatérale de la part du bailleur en dehors des cas prévus au présent chapitre, ni faire l’objet d’une tacite reconduction », sans évoquer le caractère judiciaire de la résiliation, comme c’est le cas dans d’autres législations771.
La différence flagrante entre ces réglementations, et la lettre tant de l’article L. 255-6 que de l’article L. 255-8 du Code de la construction et de l’habitation selon lequel, de manière un peu « radicale » : « À défaut pour le preneur d’exécuter ses obligations contractuelles, notamment en cas de défaut de paiement de la redevance, le bail est résilié, après indemnisation de la valeur des droits réels immobiliers tenant compte du manquement ayant entraîné la résiliation du bail, selon les modalités prévues au contrat », permettent de penser que la stipulation d’une clause de résiliation unilatérale serait possible.
La procédure de résiliation reste donc très incertaine, et il y est remédié en pratique par l’insertion d’une clause de rencontre que nous évoquons plus loin (V. infra, no ) et qui a vocation à démontrer que tout a été fait pour éviter la résiliation, même en cas de faute du preneur, puis par la rédaction de clauses reprenant les termes utilisés par le code, telles que : « En cas de défaut du preneur persistant à l’issue du délai de trois (3) mois de la période de rencontre visée à l’article précédent, ou de refus de rencontre, ou de non-rencontre, ou faute de solution, le BRS pourra être résilié unilatéralement et de plein droit, si bon semble à l’OFS, conformément à l’article L. 255-8 du Code de la construction et de l’habitation, deux (2) mois après un commandement de payer ou une sommation d’exécuter, mentionnant la présente clause de résiliation et resté(e) infructueux(se), même dans le cas de paiement ou d’exécution postérieur(e) à l’expiration du délai ci-dessus ».
Etant rappelé que l’usage des clauses résolutoires est encadré par une jurisprudence très stricte, protectrice du droit de propriété résultant de la nature réelle des droits constitués.

Fixation de l’indemnité : pratique de la décote et de la clause de rencontre

Fixer une méthode de calcul d’une indemnité de résiliation dans un contrat d’une durée généralement supérieure à quatre-vingts ans est un exercice délicat, qui doit tenir compte de deux contraintes : d’une part, l’indemnité ne pourra pas être supérieure aux valeurs maximales des droits réels telles que résultant des articles L. 255-5 et R. 255-3 du Code de la construction et de l’habitation772 ; d’autre part, le marché peut baisser, de sorte qu’il faut garder une marge de prudence entre le montant de l’indemnité et la valeur initiale, pour fixer une règle donnant si possible un résultat inférieur à la valeur du marché lors de la résiliation.
D’où la pratique de nombreux OFS, pour calculer l’indemnité, de retenir la valeur historique, de l’indexer, mais de diminuer le résultat d’une décote permettant : 1) d’éviter ce risque du marché ; 2) de faire en sorte que le preneur n’ait pas trop intérêt à une résiliation contre indemnité, mais soit plutôt encouragé à céder amiablement ses droits réels sur le marché (que l’OFS doit faire en sorte d’animer). Cette décote peut être assez importante, de l’ordre de 20 à 40 % selon les OFS qui la pratiquent et les particularités du territoire et du montage.
Elle rejoint ce que prévoit la garantie de rachat que les OLS doivent fournir en cas de vente HLM773.
Lorsqu’une telle décote est prévue, pour éviter qu’elle ne joue trop vite, et pour faire en sorte que les ménages défaillants aient toutes les chances de trouver une solution amiable plus avantageuse, les OFS ont développé la pratique des clauses dites « de rencontre », préalables à la mise en œuvre de toute résiliation pour faute.
Ces clauses ne soulèvent pas de difficulté juridique dans la mesure où la loi renvoie au contrat, dans lequel il convient qu’elles soient correctement rédigées.

Sort des baux à la fin du BRS

Dans tous les cas de résiliation pour faute, défaut d’agrément du cessionnaire, préemption et sinistre, et en fin de bail, le preneur doit quitter le logement concerné dont il perd la propriété, moyennant la perception de l’indemnisation prévue. La loi ne prévoit rien à ce titre. Le contrat devra donc indiquer ce qui se passe en cas de libération tardive.
Le seul cas prévu par le texte est celui du sort des baux consentis par le preneur en cas de survenance de la fin du BRS (donc dans l’hypothèse d’un BRS L. 255-2 autorisant la location ou d’un BRS L. 255-4) :
CCH, art. L. 255-16 : « Dans les baux qu’il consent, le preneur du bail réel solidaire mentionne, en caractères apparents, la date d’extinction du bail réel solidaire et son effet sur le contrat de bail en cours.
À défaut de cette mention, les bénéficiaires du droit au bail d’habitation ont le droit de se maintenir dans les lieux pendant une durée de trente-six mois à compter de la date d’expiration du bail réel solidaire moyennant une indemnité d’occupation égale au dernier loyer d’habitation expiré et payable dans les mêmes conditions. Cette durée est réduite à douze mois pour les bénéficiaires de baux consentis en application des chapitres II et III du titre III du livre VI du présent code ».