Le vendeur « particulier »

Le vendeur « particulier »

Rapport du 119e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2023
Nous étudierons successivement le champ d’application des plus-values immobilières des particuliers (A), les exonérations applicables (B), ainsi que le régime (C) et les modalités d’imposition (D).

Le champ d’application des plus-values immobilières

Le champ d’application des plus-values immobilières des particuliers se définit selon les personnes (I) et les biens (II) imposables, ainsi que les opérations (III).

Les personnes imposables

– Les personnes physiques dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé. – Les plus-values réalisées lors de la cession d’immeubles relèvent du régime des plus-values immobilières des particuliers (CGI, art. 150 U et s.) lorsqu’elles sont réalisées par des personnes physiques dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé, sans qu’il y ait lieu de distinguer selon leur nationalité ou leur domicile.
A contrario, le régime ne s’applique pas aux profits tirés d’une activité professionnelle qui relèveront des BIC s’ils sont réalisés à titre habituel et/ou spéculatif1263. Le régime ne s’applique pas non plus aux plus-values consécutives à la cession d’immeubles figurant à l’actif d’une entreprise et affectés réellement à l’activité : elles relèveront du régime des plus-values professionnelles.
– Les sociétés de personnes. – Le régime des plus-values immobilières s’applique également aux associés de sociétés de personnes transparentes et translucides, relevant des articles 1655 ter et 8 à 8 ter du Code général des impôts.
L’article 1655 ter vise les sociétés transparentes ou sociétés d’attribution : les droits sociaux sont considérés comme des fractions d’immeubles et chaque associé est fiscalisé lors de la cession comme s’il avait cédé personnellement le bien.
Le régime des articles 150 U et suivants du Code général des impôts est également applicable aux cessions réalisées par des sociétés relevant de plein droit ou sur option des articles 8 et 8 ter du même code, qui exercent une activité non professionnelle. En pratique, sont visées les sociétés civiles immobilières non passibles de l’impôt sur les sociétés.
Chacun de ses associés sera imposé pour la quote-part de plus-value lui revenant, et le régime applicable dépendra de la qualité des associés : associé soumis à l’IS ou relevant de plein droit d’un régime réel d’imposition1264 (BIC, BA ou BNC), sociétés de personnes interposées ou autres associés.

Les biens imposables

La loi vise tant « les biens immobiliers bâtis ou non bâtis » et les « droits relatifs à ces immeubles » (CGI, art. 150 U) que les droits sociaux de sociétés à prépondérance immobilière (CGI, art. 150 UB).
– Les biens immobiliers et les droits immobiliers. – Les plus-values imposables sont celles qui proviennent de la cession à titre onéreux d’immeubles, bâtis ou non bâtis. L’imposition est indépendante de l’origine de propriété (titre onéreux ou titre gratuit).
– La première cession à titre onéreux de l’usufruit temporaire. – Le régime s’applique aussi aux droits relatifs à ces immeubles (usufruit, nue-propriété…) Il est à noter que depuis le 14 novembre 20121265, la première cession à titre onéreux de l’usufruit temporaire d’un bien immobilier sera imposée non pas selon le régime des plus-values immobilières des particuliers, mais selon le régime d’imposition des revenus procurés par ledit bien. Ainsi, si le bien est loué nu ou susceptible de l’être, le gain est imposé dans la catégorie des revenus fonciers.
– Les titres de sociétés à prépondérance immobilière. – L’article 150 UB du Code général des impôts soumet au régime d’imposition des plus-values immobilières les plus-values de cession de titres de société à prépondérance immobilière. Au sens des plus-values, est à prépondérance immobilière la société non soumise à l’IS, et dont l’actif est, à la clôture des trois exercices précédant la cession, principalement constitué d’immeubles non affectés à sa propre exploitation.
En vertu de l’article 74 A bis de l’annexe II du Code général des impôts, la société est à prépondérance immobilière si les immeubles à prendre en compte représentent plus de 50 % de l’actif. À la clôture des trois exercices qui précèdent la cession, on doit comparer la valeur vénale des immeubles non affectés à l’exercice de la société à celle de la totalité des éléments de l’actif social.
Si la société est à prépondérance immobilière au sens de l’article 150 UB du Code général des impôts, la plus-value de cession sera imposée aux mêmes taux que la plus-value sur l’immeuble. Le calcul de la plus-value imposable fait l’objet de particularités qui seront développées ultérieurement.

Les opérations taxables

– Les cessions à titre onéreux. – Selon l’article 150 U du Code général des impôts, seules sont imposables les plus-values réalisées lors d’une cession à titre onéreux. Sont hors champ d’application les plus-values latentes ou les plus-values réalisées à l’occasion de mutations à titre gratuit, entre vifs ou par décès.
La notion de cession à titre onéreux est plus large que la vente, car elle englobe également les échanges, les apports en société, les expropriations et certains partages.
– Les partages non imposables. – Le partage est l’acte juridique qui met fin à une indivision en répartissant les biens indivis entre les différents copartageants. Alors que sur le plan juridique, il est toujours déclaratif (C. civ., art. 883), sur le plan fiscal le régime applicable (déclaratif ou translatif) dépendra de la qualité des copartageants et de l’origine de l’indivision (CGI, art. 150 U, IV).
Les partages purs et simples ou avec soulte et plus-values de biens immobiliers reçus par succession, des biens acquis par des époux avant ou pendant le mariage, des biens acquis par des partenaires avant ou après qu’ils se soient pacsés ne constituent pas des mutations à titre onéreux dès lors qu’ils interviennent entre les membres originaires de l’indivision, leur conjoint, des ascendants, des descendants ou des ayants cause à titre universel de l’un ou de plusieurs d’entre eux.
Il en est de même pour les partages de biens indivis issus d’une donation-partage. L’administration1266 accepte d’appliquer cette exonération aux partages de biens indivis acquis par des concubins pendant le concubinage.
Dans ces situations, le partage est considéré comme une opération intercalaire : l’imposition de la plus-value n’interviendra que lors de la cession ultérieure du bien par l’attributaire. La plus-value imposable sera alors calculée à partir de la date et de la valeur d’acquisition du bien par l’indivision.
– Les partages imposables à hauteur de la soulte. – Lorsque le partage n’entre pas dans le champ d’application de l’article 150 U, IV du Code général des impôts, il constitue une mutation à titre onéreux à hauteur de la soulte versée par l’attributaire à ses copartageants. Si le partage est pur et simple, le partage est non imposable et considéré comme une opération intercalaire. Le prix de cession correspondra à la soulte versée. Le prix d’acquisition sera le prix effectivement acquitté par le cédant ou la valeur vénale en cas de transmission à titre gratuit. La plus-value brute sera diminuée d’un abattement pour durée de détention à compter de l’entrée du bien dans l’indivision.
– Les licitations selon la qualité du bénéficiaire. – La licitation est une vente de biens ou de droits indivis, qui peut être réalisée aux enchères ou à l’amiable1267. Le régime fiscal applicable dépendra de la qualité du bénéficiaire de la licitation.
Si la licitation intervient au profit d’un tiers étranger à l’indivision, elle constitue une cession à titre onéreux, qu’elle fasse cesser ou non l’indivision. Chacun des colicitants est alors imposé à raison de sa quote-part de plus-value réalisée.
Si la licitation intervient au profit de l’un des coïndivisaires, son conjoint, ses descendants ou ascendants ou ayants droit à titre universel, on appliquera les mêmes règles que pour le partage.

Les exonérations

La vente du logement peut être exonérée sous certaines conditions lorsqu’elle est réalisée par un résident (I) et que le bien constitue sa résidence principale ou est destiné à financer sa résidence principale. Les non-résidents peuvent bénéficier d’une éventuelle exonération (III). D’autres exonérations sont susceptibles de s’appliquer (II).

Liées à la résidence principale

La vente de la résidence principale (CGI, art. 150 U, II, 3°)

Les plus-values réalisées lors de la cession de la résidence principale du cédant au jour de la cession sont exonérées1268. Cette exonération s’applique aux dépendances immédiates et nécessaires cédées simultanément avec l’immeuble1269.
La résidence principale au jour de la cession. L’immeuble doit constituer la résidence habituelle du propriétaire, c’est-à-dire le lieu où le contribuable réside habituellement pendant la majeure partie de l’année. Il doit s’agir de la résidence effective du contribuable. L’utilisation temporaire d’un logement ne permet pas de bénéficier de l’exonération. En cas de doute, il appartient au contribuable de démontrer l’effectivité de la résidence. Le logement peut constituer la résidence principale du cédant au jour de la cession : l’immeuble cédé doit constituer la résidence principale du propriétaire lui-même et être effectivement occupé par celui-ci. L’exonération est exclue pour les logements qui, bien qu’ayant été antérieurement résidence principale, n’ont plus cette qualité : immeubles donnés en location, immeubles occupés gratuitement par la famille ou des tiers, logements vacants…
L’administration apporte des assouplissements dans certaines situations1270 :
  • immeuble occupé jusqu’à sa mise en vente1271 ;
  • immeuble occupé par le futur acquéreur1272 ;
  • immeuble cédé suite à une séparation1273 ;
  • immeuble constituant la résidence principale d’un contribuable incarcéré1274 ;
  • cession d’un immeuble en cours de construction1275 ;
  • et les péniches ou bateaux à usage d’habitation principale du cédant1276.
– L’exonération des dépendances immédiates et nécessaires. – Les dépendances immédiates et nécessaires sont exonérées lorsqu’elles sont cédées en même temps que la résidence principale1277. L’exonération portera sur l’ensemble du terrain entourant l’immeuble, quelle que soit la superficie dès lors qu’il n’est pas vendu comme un terrain à bâtir, au sens de la TVA1278.
Pour l’administration, les garages situés à une distance inférieure d’un kilomètre de la résidence principale constituent une dépendance immédiate et nécessaire. Il en est de même pour les chambres de bonne situées dans le même immeuble que la résidence principale.
Les dépendances doivent être cédées simultanément avec la résidence principale, c’est-à-dire en même temps que la résidence principale exonérée. La vente peut être réalisée au profit d’acquéreurs distincts dans un délai maximum d’un an.

Le logement autre que la résidence principale (CGI, art. 150 U, II, 1°bis)

La plus-value réalisée au titre de la première cession d’un logement autre que la résidence principale (et de ses dépendances immédiates et nécessaires) est exonérée sous une double condition.
Le cédant ne doit pas être propriétaire de sa résidence principale, directement ou par personne interposée, au cours des quatre années précédant la cession.
Le cédant est tenu de remployer, dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la cession, tout ou partie du prix de cession du logement dans l’acquisition ou la construction d’un logement qu’il affecte à sa résidence principale.
L’exonération s’applique sur demande expresse du cédant dans l’acte de vente. Elle sera totale si le remploi porte sur un logement dont le prix d’acquisition est au moins égal au prix de l’immeuble cédé. Elle sera partielle à hauteur du pourcentage du prix de vente destiné à être remployé dans l’acquisition ou la construction de la future résidence principale.

Les autres exonérations susceptibles de s’appliquer

D’autres exonérations sont susceptibles de s’appliquer en cas de cession d’un logement.
L’article 150 U, II, 4° du Code général des impôts exonère sous condition de remploi les plus-values réalisées lors de la cession d’immeubles pour lesquels une déclaration d’utilité publique a été prononcée en vue d’une expropriation.
L’article 150 U, II, 6° du même code exonère les immeubles, parties d’immeubles ou droits immobiliers dont le prix de cession est inférieur ou égal à 15 000 €.
Les retraités ou invalides disposant de faibles revenus échappent à la taxation des plus-values immobilières sous réserve de remplir les conditions de l’article 150 U, III du Code général des impôts.
Le résident d’un établissement social ou médico-social est exonéré de plus-value lors de la cession du bien qui a constitué sa résidence principale (CGI, art. 150 U, II, 1° ter).

L’exonération applicable aux non-résidents

Les non-résidents relevant de l’impôt sur le revenu bénéficient de certaines exonérations applicables aux résidents, mais également d’exonérations spécifiques.
– Les exonérations des résidents applicables. – Les non-résidents bénéficient, lors de la cession d’immeubles, des mêmes exonérations que les résidents à l’exception :
  • de l’exonération de la résidence principale ;
  • de l’exonération de la première cession d’un logement lorsque le cédant n’est pas propriétaire de sa résidence principale ;
  • de l’exonération de l’ancienne résidence principale des retraités et invalides de condition modeste.
– Les exonérations spécifiques aux non-résidents. – L’exonération de l’habitation en France des non-résidents prévue à l’article 150 U, II, 2° du Code général des impôts s’applique lors de la cession d’un bien qui constitue en France l’habitation d’une personne physique ressortissant d’un État membre de l’Union européenne, de l’Islande, de la Norvège ou du Liechtenstein. Cette exonération, qui s’applique dans la limite d’une seule résidence par contribuable, est subordonnée à une double condition.
D’une part, le cédant doit avoir été fiscalement domicilié en France de manière continue pendant au moins deux ans à un moment quelconque avant la cession.
D’autre part, la cession doit être réalisée au plus tard le 31 décembre de la cinquième année suivant celle du transfert par le cédant de son domicile fiscal hors de France, ou elle doit porter sur un bien dont le cédant a la libre disposition au moins depuis le 1er janvier de l’année précédant celle de la cession.
L’exonération est limitée à la fraction de plus-value nette imposable qui n’excède pas 150 000 €, le surplus étant imposable.
– La cession de l’ancienne résidence principale en France. – L’article 244 bis A, I, 1 du Code général des impôts institue une exonération en faveur des personnes physiques, qui ayant transféré leur domicile fiscal hors de France, cèdent depuis le 1er janvier 2019 leur ancienne résidence principale :
  • le cédant doit avoir transféré sa résidence vers un État membre de l’Union européenne ou un État ayant conclu une convention fiscale avec la France ;
  • la cession doit être réalisée au plus tard le 31 décembre de l’année suivant celle du transfert ;
  • l’ancienne résidence principale ne doit pas être mise à la disposition d’un tiers, à titre gratuit ou onéreux, entre le départ de France et la cession.

L’imposition du vendeur

L’article 150 V du Code général des impôts calcule la plus ou moins-value brute (I) par différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition. Si le bien est détenu depuis plus de cinq ans, la plus-value imposable sera réduite d’un abattement pour durée de détention (II).

Le calcul de la plus-value brute

Les règles de détermination de la plus-value brute sont différentes selon que la cession porte sur l’immeuble (a) ou sur les titres d’une société à prépondérance immobilière (b).

La cession de l’immeuble

– Le prix de cession. – Il est défini à l’article 150 VA du Code général des impôts. Il s’agit « du prix réel tel que stipulé à l’acte ». Il est majoré de toutes les charges et indemnités mentionnées à l’article 683 I du même code, c’est-à-dire les charges en capital et les indemnités stipulées au profit du vendeur.
Le prix est réduit du montant de la TVA acquittée et des frais définis par décret, supportés par le vendeur à l’occasion de la cession1279. Les frais déductibles sont listés de manière exhaustive par l’article 41 duovicies H, annexe III du Code général des impôts1280.
– Le prix de revient. – Il est défini à l’article 150 VB du Code général des impôts. En cas d’acquisition à titre onéreux, c’est le prix effectivement acquitté par le cédant. En cas d’acquisition à titre gratuit, on retiendra la valeur ayant servi à liquider les droits de mutation à titre gratuit.
Le prix d’acquisition est majoré des frais d’acquisition. En cas d’acquisition à titre onéreux, ils peuvent être retenus soit pour leur montant réel, soit forfaitairement pour un montant de 7,5 % du prix d’acquisition1281. En cas d’acquisition à titre gratuit, ils se limitent aux frais d’acte et de déclaration ainsi qu’aux droits de mutation à titre gratuit qui ont été effectivement supportés par le cédant.
Le prix d’acquisition est majoré des dépenses de travaux 1282, soit forfaitairement pour un montant égal à 15 % du prix d’acquisition lorsque l’immeuble est détenu depuis au moins cinq ans soit sous certaines conditions pour leur montant réel1283.
Les dépenses de travaux qui sont déductibles se rapportent à des travaux de construction, de reconstruction, d’agrandissement ou d’amélioration. Elles sont supportées par le vendeur et les travaux doivent avoir été réalisés par une entreprise depuis l’achèvement de l’immeuble ou son acquisition. Elles ne doivent pas avoir été prises en compte pour l’impôt sur le revenu et ne pas constituer des dépenses locatives.

La cession des parts de sociétés à prépondérance immobilière

– Assiette de la plus-value. – Elle est déterminée par différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition.
Le prix de cession est le prix convenu entre les parties incluant, le cas échéant, les contreparties positives ou négatives obtenues par le cédant ou qui lui ont été imposées (remboursement du solde créditeur d’un compte courant d’associé).
Le prix d’acquisition correspond à la valeur nominale des parts, si le cédant en est un des associés fondateurs ; sinon on prendra en compte le prix d’acquisition selon les mêmes modalités que pour l’acquisition en direct d’un immeuble.
En raison de la semi-transparence de la société dont les titres sont cédés, la jurisprudence Quémener-Baradé du Conseil d’État1284 autorise à retraiter le prix d’acquisition au titre de chaque année de détention :
  • en le majorant de la quote-part des bénéfices imposés chez l’associé (y compris les plus-values) et des pertes comblées par l’associé ;
  • en le minorant des déficits déduits par l’associé (y compris les moins-values) et des bénéfices appréhendés par l’associé.
La solution de la juridiction administrative revient à majorer le prix d’acquisition du montant des bénéfices non distribués et à le minorer du montant des déficits non comblés.
– Imposition de la plus-value. – La plus-value est déterminée et imposée selon les articles 150 UB et suivants du Code général des impôts. Les frais d’acquisition ne sont déductibles que pour leur montant réel, il n’est pas possible d’appliquer le forfait de 7,5 % du prix d’acquisition de l’article 150 VB du même code. Il n’est pas possible de majorer le prix d’acquisition des parts des travaux effectués par la société soit pour leur montant réel, soit pour le montant forfaitaire de 15 %.
– Les exonérations éventuellement applicables – Lorsque la société met un logement à la disposition de l’associé cédant qui l’occupe à titre d’habitation principale, la fraction de plus-value revenant à cet associé peut être exonérée. L’article 150 UB du Code général des impôts ne visant pas les exonérations prévues aux II et III de l’article 150 U du même code, les autres exonérations et notamment celle tenant au montant de la cession sont inapplicables aux cessions de titres de société à prépondérance immobilière.

L’abattement pour durée de détention

Lorsque la vente porte sur un immeuble ou des parts de sociétés à prépondérance immobilière, détenus depuis plus de cinq ans, la plus-value imposable est réduite d’un abattement pour durée de détention. Le taux et la cadence de l’abattement diffèrent selon le calcul de l’impôt de plus-value ou des prélèvements sociaux.
– Abattement pour l’impôt de plus-value. – Pour déterminer la plus-value immobilière imposable à l’impôt, il est pratiqué sur la plus-value brute un abattement aux taux suivants :
  • un abattement de 6 % par an à compter de la sixième année et jusqu’à la vingt et unième ;
  • un abattement de 4 % au terme de la vingt-deuxième année de détention. L’exonération de l’impôt de plus-value est acquise au-delà d’un délai de détention de vingt-deux ans.
– Abattement pour les prélèvements sociaux. – Pour les prélèvements sociaux, les taux d’abattement sont les suivants :
  • 1,65 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième année et jusqu’à la vingt et unième ;
  • 1,60 % pour la vingt-deuxième année de détention ;
  • 9 % pour chaque année au-delà de la vingt-deuxième.
L’exonération des prélèvements sociaux sera acquise au-delà d’un délai de détention de trente ans.
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Imposition des plus-values immobilières : abattements et éxonérations liées à la durée de détention

Les modalités d’imposition

– Imposition du résident personne physique. – Les plus-values imposables sont soumises à l’IR au taux proportionnel de 19 %. Elles sont également soumises aux prélèvements sociaux au taux global de 17,2 % depuis le 1er janvier 2018.
Les plus-values immobilières imposables supérieures à 50 000 € supportent une surtaxe prévue à l’article 1609 nonies G du Code général des impôts allant de 2 % à 6 %.
– Imposition du non-résident. – Lorsque le cédant personne physique non-résident est soumis à l’impôt sur le revenu, quel que soit son lieu de résidence, il se voit appliquer un taux de prélèvement fixé depuis le 1er janvier 2015 à 19 %.
Lorsque le cédant ne relève pas du régime obligatoire de sécurité sociale français, les prélèvements sociaux se limiteront au seul prélèvement de solidarité de 7,5 %. Ces nouvelles dispositions résultent de l’article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 20191285.
La surtaxe de l’article 1609 nonies G du Code général des impôts est susceptible de s’appliquer au non-résident.
Si le cédant est soumis à l’IS, il se verra appliquer un prélèvement de 19 % s’il est résident d’un État de l’Espace économique européen et de 25 % dans les autres cas.
Lorsque le bien dépend du patrimoine professionnel du cédant, la cession est soumise non pas au régime des plus-values immobilières des particuliers, mais au régime des plus-values professionnelles. Nous laisserons de côté les plus-values imposées en bénéfice d’exploitation lorsqu’elles sont réalisées par des professionnels de l’immobilier1286.

Logement détenu en direct ou par une SCI

1/ M. et Mme House ont acquis en janvier 2004 un logement au prix de 300 000 €. Le taux moyen d’imposition à l’IR est de 30 %. Ils cèdent en janvier 2022 pour un prix de 400 000 €.
Prix de cession : 400 000 €
Prix d’acquisition : 300 000 €
Frais d’acquisition (montant réel ou 7,5 %) 22 500 €
Travaux (15 % si + 5 ans ou montant réel) 45 000 €
Prix d’acquisition corrigé 367 500 €
PV brute 32 500 €
Impôt sur la PV
Abattement pour DD (18 ans de détention soit 78 %) -25 350 €
PV imposable 7 150 €
Impôt sur la PV (19 %) 1 359 €
Prélèvements sociaux
Abattement pour DD (18 ans de détention, soit 21,45 %) -6 971 €
Assiette des PS 25 529 €
PS au taux de 17,20 % depuis le 1er janvier 2018 = 4 391 €
Total : 1 359 € + 4391 € = 5 750 €.
NB : La plus-value nette imposable étant inférieure à 50 000 €, la taxe supplémentaire de 1609 nonies G du Code général des impôts n’est pas exigible.
Variante : M. et Mme House ont constitué une SCI au capital de 10 000 €. Ils sont imposés au taux d’IR de 30 %. La SCI a acquis le logement en janvier 2004 au prix de 300 000 €. Les parts sont cédées au prix de 400 000 € en janvier 2022.
Quelle sera la fiscalité applicable au cédant si la SCI a ou non opté pour l’IS et que la cession porte sur l’immeuble et non sur les parts sociales ?
Si la SCI opte pour l’IS, il sera pratiqué un amortissement de 15 000 € par an.
1. SCI SEMI-TRANSPARENTE
A. – Si la SCI cède l’immeuble
1° Taxation de la SCI au titre de la plus-value V. 1
Prix de cession 400 000 €
Prix d’acquisition 300 000 €
Frais d’acquisition (montant réel ou 7,5 %) 22 500 €
Travaux (15 % si + 5 ans ou montant réel) 45 000 €
Prix d’acquisition corrigé 367 500 €
Plus-value brute 32 500 €
Impôt sur la PV (19 %) 1 359 €
PS au taux de 17.20 % depuis le 1er janvier 2018 4 391 €
Total : 1 359 € + 4391 € = 5 750 €.
2° Dissolution et partage du prix
– Procès-verbal de dissolution à enregistrer gratis (le droit fixe de 375 €/500 € ayant été supprimé par la loi de finances pour 2019).
– Sur le boni de liquidation, perception du droit de partage au taux de 2,50 % :
Assiette :
Disponible sur prix de cession : 400 000 – 5750 = 394 250 €.
À déduire :
Passif social : 10 000 €.
Reste soumis au droit de partage : 384 250.
Droits dus (384 250 × 2,5 %) : 9 606.
Disponible à répartir entre les associés : 374 644 + 10 000 = 384 644.
B. – Les associés cèdent leurs parts
1° Pour M. House
Prix de cession : 200 000 €
Prix d’acquisition : 5 000 €
(à corriger le cas échéant par la jurisprudence Quémener)
Frais d’acquisition (montant réel) mémoire
PV brute 195 000 €
• Impôt sur la plus-value :
Abattement pour durée de détention (6 % par an à compter de la sixième année) :
13 × 6 % × 195 000 € -152 100
78 %
Plus-value nette imposable 42 900 €
Impôt sur la plus-value (19 % × 42 900 €) 8 151 €
• Prélèvements sociaux :
Plus-value brute 195 000 €
Abattement pour durée de détention (1,65 % à compter de la sixième année) :
13 × 1,65 % × 195 000 € -41 828 €
21,45 %
Plus-value nette imposable 153 172 €
Prélèvements sociaux (17 2 % × 153 172 €) 26 346 €
• Taxe additionnelle de l’article 1609 nonies du Code général des impôts :
NB : La plus-value nette imposable étant inférieure à 50 000 €, la taxe supplémentaire de 1609 nonies G du Code général des impôts n’est pas exigible.
Total des prélèvements= 8 151 + 26 346 = 34 497 €.
Disponible après prélèvements fiscaux : 165 503 €.
2° Pour Mme House
Même calcul
Impôt sur la plus-value 8 151 €
Prélèvements sociaux 26 346 €
Total des prélèvements 34 497 €
Disponible après prélèvements fiscaux 165 503 €
Cumul du disponible pour les associés 331 006 €
2. SCI OPAQUE (APRÈS OPTION IS)
A. – La SCI cède l’immeuble
1° Impôt sur la plus-value
Prix de cession 400 000 €
Valeur nette comptable
300 000 – [15 000 × 18] = 300 000 – 270 000 30 000 €
Plus-value totale 370 000
IS à taux réduit : 38 120 × 0,15 5 718 €
IS au taux normal pour le surplus de la plus-value
331 880 × 25 % 82 970 €
Total de l’impôt sur les sociétés sur la plus-value 88 688 €
Les disponibilités à répartir entre les associés s’élèveront à :
400 000 – 88 688 = 311 312 €.
2° Dissolution et partage du boni
Sur le boni de liquidation, perception du droit de partage au taux de 2,50 % :
Assiette :
Disponible sur prix de cession 311 312 €
À déduire :
Passif social 10 000 €
Reste soumis au droit de partage 301 312 €
Droits dus (301 312 € × 2,5 %) 7 533 €
3° Le boni revenant à chacun des associés sera imposé sur option à l’impôt sur le revenu en tant que dividende en revenus de capitaux mobiliers, à défaut à la flat tax de 30 %.
Flat tax à 30 %
Boni de liquidation (301 312 € – 7 533) 293 779 €
Flat tax à 30 % : 293 779 × 0,3 88 134 €
Plus intéressant que la taxation au barème progressif
• Disponible pour les époux House :
Remboursement d’apport 10 000 €
Boni de liquidation 293 779 €
Ensemble 303 779 €
• À déduire :
Prélèvements -88 134 €
Disponible 215 645 €
B. – Les associés cèdent leurs parts
• Pour M. House
Prix de cession 200 000 €
Prix d’acquisition 5 000 €
Frais d’acquisition (montant réel) mémoire
Plus-value brute 195 000 €
1) Taxation de la PV au barème progressif sur option
Impôt sur la plus-value
Abattement de 65 % (CGI, art. art. 150-0 D, 1) -126 750 €
Plus-value imposable 68 250 €
Impôt (impôt sur le revenu au taux de 30 %) 20 475 €
Prélèvements sociaux :
Assiette (plus-value brute) 195 000 €
Prélèvements sociaux (17,2 %) 33 540 €
Total des prélèvements 54 015 €
• Pour Mme House
Même calcul
Impôt (impôt sur le revenu au taux de 30 %) 20 475 €
Prélèvements sociaux (17,2 %) 33 540 €
Total des prélèvements 54 015
Soit un disponible de 400 000 – 54 015 × 2 = 291 970 €
2) Flat tax :
Plus-value brute 195 000 €
Flat tax : 0,30 × 195 000 58 500 €
C’est moins intéressant que la taxation de la plus-value au barème progressif.