L'ingénierie notariale au service du projet de l'entreprise
Créer « son affaire », c'est avant tout vouloir concrétiser un projet. Ce projet est synonyme d'initiatives individuelles ou collectives. Les sociétés modernes se doivent d'encourager leurs contemporains à les rechercher par eux-mêmes, et à faciliter autant que possible leur réalisation et leur développement. L'État ne peut en effet les suppléer, avec moins de 5 % de son budget dédié aux dépenses d'investissement003, mais aussi car la puissance publique n'a pas vocation première à intervenir dans le secteur économique004, à défaut de capacité suffisante en termes de créativité ou d'analyse microéconomique des besoins mouvants des marchés. La responsabilité des États est alors d'offrir, à tout le moins, les moyens législatifs adaptés pour permettre aux citoyens de réaliser leurs projets, au niveau du mode d'exploitation (Titre I), lequel aura un impact direct sur la personne et le patrimoine du créateur d'entreprise (Titre II), qui nous conduira à proposer la création d'une nouvelle forme sociale (Titre III).
Comme nous l'avons étudié ci-dessus245, le praticien dispose à ce jour d'un arsenal très vaste de possibilités lorsqu'il s'agira de guider un client dans la création d'une société ou d'adapter celle-ci. La « boîte à outils » du droit des sociétés permet de répondre à une multiplicité de besoins pour structurer un projet d'entreprise, ou d'investissement, via un véhicule sociétaire.
Aussitôt prise la décision d'entreprendre, le porteur de projet voudra nécessairement trouver une modalité d'exercice de son activité qui soit compatible avec l'ensemble de ses aspirations et de ses contraintes extrinsèques et intrinsèques. Cette recherche pourra utilement être appuyée des conseils d'un juriste qui dispose d'une vision globale, entrepreneuriale, familiale, patrimoniale, donc notariale. Avant d'esquisser un état des lieux de ces modalités (Sous-titre II), il paraît impératif d'en exposer les enjeux globaux (Sous-titre I).
– Les évolutions. – Avec le temps, et au gré de nombreuses réformes, cette notion traditionnelle d'unicité du patrimoine s'est estompée.
Naturellement, l'entreprise, pour survivre, va devoir s'adapter et se renouveler. Plusieurs défis vont donc devoir être relevés par le chef d'entreprise. Il s'agit tout d'abord d'assurer le développement par des moyens financiers adéquate (Titre I). Ensuite, il conviendra de s'assurer que les statuts, le pacte statutaire et le cas échéant, le pacte Dutreil, sont en concordance avec les souhaits et attentes du chef d'entreprise (Titre II). Enfin, le notaire, conseil du chef d'entreprise, devra l'accompagner dans toutes les étapes de la vie de l'entreprise pour sécurider les engagements pris (Titre III).
Force est de constater que la nature et l'ampleur des missions qui ont été confiées au notaire, en droit des sociétés, par les pouvoirs publics ont toujours été initialement mesurées à l'aune des attentes de la société et dictées par les impératifs économiques du moment.
Le projet nourri par l'entreprise va nécessairement demander de mobiliser des moyens financiers. Au-delà du projet initial, dont la seule certitude est qu'il sera à géométrie variable, l'entreprise devra anticiper ses futurs développements et se ménager par avance la capacité de les financer.
– Le plan. – Deux grandes natures de pacte doivent être étudiées, qui répondent chacune à leur propre logique : les pactes statutaires ou extrastatutaires, d'une part, qui ont pour finalité d'assurer le fonctionnement de l'entreprise (Sous-titre I), et les pactes Dutreil, d'autre part, qui ont pour finalité de réduire le coût fiscal d'une transmission à titre gratuit (Sous-titre II).
Après avoir dépeint quelques propos introductifs (Sous-titre I), nous étudierons les qualités et défauts de la société en tant que véhicule patrimonial, tant sur le plan de l'investissement et de la gestion d'actifs (Sous-titre II) que de sa transmission (Sous-titre III), avec un regard affûté sur les conséquences du choix de son régime fiscal (Sous-titre IV).
– Le constat. – Il est aujourd'hui un constat qui peut être partagé par tout le monde : la place de l'entreprise au sein de la société se modifie en profondeur. Il n'y a pas un jour qui s'écoule sans que l'on évoque les nouveaux enjeux et les nouvelles attentes à son sujet, qu'il s'agisse des enjeux sociaux, sociétaux ou environnementaux, des nouvelles règles de gouvernance, ou bien encore de la place des « parties prenantes »865.
L'ingénierie notariale au service du projet de l'entreprise
Rapport du 118e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2022