La présomption de fiabilité de la signature qualifiée

La présomption de fiabilité de la signature qualifiée

Rapport du 117e Congrès des notaires de France - Dernière date de mise à jour le 31 janvier 2021
? La présomption de fiabilité. ? L'article 1367 du Code civil dispose que : « La fiabilité de ce procédé [d'identification garantissant le lien de la signature avec l'acte auquel elle s'attache] est présumée, jusqu'à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire assurée et l'intégrité de l'acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ». Ce type de signature correspond, selon l'article 1er du décret no 2017-1416 du 28 septembre 2017, à la signature qualifiée ci-dessus décrite.
En droit commun, l'article 1372 du Code civil (C. civ., art. 1372) dispose que : « L'acte sous signature privée, reconnu par la partie à laquelle on l'oppose ou légalement tenu pour reconnu à son égard, fait foi entre ceux qui l'ont souscrit et à l'égard de leurs héritiers et ayants cause ». L'article 1373 du Code civil (C. civ., art. 1373) ajoute que : « La partie à laquelle on l'oppose [l'acte sous signature privée] peut désavouer son écriture ou sa signature (…). Dans ces cas, il y a lieu à vérification d'écriture ». Pour contester la réalité d'un acte sous signature privée, il faut donc s'opposer à y avoir adhéré en y apposant sa signature ou à l'avoir rédigé. S'ouvre alors la procédure de vérification d'écriture de l'article 287 du Code de procédure civile (CPC, art. 287) Sur la signature électronique et la procédure de vérification d'écriture, V. : L. Grynbaum, C. Le Goffic et L. Morlet-Haïdara, Droit des activités numériques, Précis Dalloz, 1re éd., 2014, nos 63 et s. . Il revient dans cette hypothèse à celui qui se prévaut de l'écrit d'en démontrer la sincérité Cass. 1re civ., 17 mai 1972, no 71-11.211 : Bull. civ. 1972, I, no 132, p. 117. .
En présence d'une signature électronique et d'une contestation de l'écriture ou de la signature, le juge doit vérifier si les conditions des articles 1366 et 1367 du Code civil sont respectées (CPC, art. 287, al. 2). Dans l'hypothèse où elles ne sont pas satisfaites, alors l'écrit ne vaut pas comme preuve littérale mais dégénère en commencement de preuve par écrit (C. civ., art. 1362). C'est notamment le cas en présence d'une signature électronique simple ou avancée.
Ainsi, à l'égard d'un courrier électronique, la Cour de cassation a déjà écarté la présomption de fiabilité de la signature électronique qualifiée (ce qui s'explique par le fait qu'une simple adresse mail ne permet pas d'identifier avec certitude son auteur, et ne remplit donc pas les conditions de l'article 1367 du Code civil) V. M. Quéméner, F. Dalle et C. Wierre, Quels droits face aux innovations numériques ?, Gualino, 2020, no 309. et a donc qualifié le courriel de « commencement de preuve par écrit » Cass. 1re civ., 20 mai 2010, no 09-65.854. En l'espèce, un congé avait été délivré par un locataire à son bailleur, lequel en avait accusé réception par voie de courrier électronique et contestait devant la cour d'appel la réalité de cet e-mail. La cour d'appel de Dijon avait admis à titre de preuve ce courrier électronique en se fondant sur la présomption de fiabilité de l'ancien article 1316-4 du Code civil attachée à la signature électronique sécurisée. La Cour de cassation casse cet arrêt au motif que la cour d'appel aurait dû respecter la procédure de vérification d'écriture de l'article 287 du Code de procédure civile en raison de la contestation par le bailleur de la réalité de cet e-mail. . La difficulté résulte dans ce cas, pour celui qui se prévaut de l'écrit, d'établir qu'il émane de celui à qui il l'oppose. Cette preuve peut notamment résulter de l'ordinateur du supposé émetteur, de son serveur ou encore de l'hébergeur de sa messagerie Sur le commencement de preuve par écrit, V. : L. Grynbaum, C. Le Goffic et L. Morlet-Haïdara, Droit des activités numériques, Précis Dalloz, 1re éd., 2014, no 65 et M. Quéméner, F. Dalle et C. Wierre, Quels droits face aux innovations numériques ?, Gualino, 2020, nos 309 et s. .
Dans l'hypothèse où au contraire l'écrit électronique répond aux exigences des articles 1366 et 1367 du Code civil, l'écrit est présumé établi par celui dont il semble émaner (C. civ., art. 1367, al. 2). Il revient donc à celui qui est présumé être l'auteur ou le signataire de renverser la présomption et prouver que l'écrit n'émane pas de lui.
Cette présomption de fiabilité en faveur de l'écrit électronique qualifié ne permettrait-elle pas de lui attacher une force probante supérieure à l'écrit papier ?